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26 septembre 2013 4 26 /09 /septembre /2013 19:39

"(...) son regard est penché, son visage est penché sur moi, il attend un signe de moi pour rire, pour sourire : Henri m’a regardé, Henri a pensé à moi, Henri m’a parlé… mais qui suis-je, moi, pour émouvoir le cœur de Dieu, pour toucher son cœur. Qui suis-je ? la foi me dit : tu es tout pour lui, ça c’est la foi. Tu es précieux à mes yeux, je t’ai gravé sur les paumes de mes mains, je t’ai gravé sur mon  cœur, la foi chrétienne c’est cette découverte émerveillée que je suis l’enfant  chéri du Père. (...)

si le coeur vous en dit : https://www.youtube.com/watch?v=zCQ48_DgMAM&feature=c4-overview&list=UUvZ0TcjA7jCdRe5VS6dWjdQ

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23 septembre 2013 1 23 /09 /septembre /2013 14:15

EUGENE BERSIER

SERMONS CHOISIS

 

La royauté de Jésus-Christ

 

« Alors Pilate dit à Jésus-Christ : « Tu es donc roi ? » Jésus répondit : « Tu l’as dit, je suis roi »

Jean 18, 37

 

Mes frères,

L’histoire ne nous a pas conservé de dialogue plus émouvant que ces deux courtes paroles qui furent échangées le jour du vendredi saint, au prétoire romain de Jérusalem, entre Pilate et Jésus-Christ.

Il plut à Dieu qu’en ce jour-là deux pouvoirs se rencontrassent : d’un côté, le représentant de la puissance la plus formidable qui eût jamais pesé sur la terre, un proconsul de la Rome impériale ; de l’autre, un accusé fléchissant sous les opprobres et succombant sous sa faiblesse, ce Galiléen misérable qu’on appelait Jésus de Nazareth : deux royautés en présence, l’une visible, l’autre spirituelle, l’une de la terre, l’autre des âmes, l’une de l’heure présente, l’autre de l’avenir et de l’éternité.

Nous désirons, avec l’aide de Dieu, mes frères, étudier la réponse de Jésus au proconsul romain. Dans ce but, nous rechercherons d’abord quel est le sens de la prétention qu’exprime le Christ par ces mots : Je suis roi. Nous ferons voir ensuite comment cette prétention s’est accomplie à travers les âges et comment elle se réalise encore aujourd'hui.

 

Des hommes, des esprits généreux, qui tiennent à demeurer chrétiens, et dont la sincérité ne fait d’ailleurs pour nous l’objet d’aucun doute, ont cru qu’ils rendraient le christianisme plus acceptable à nos contemporains, s’ils parvenaient à le faire rentrer dans les proportions d’un fait historique produit par la conscience religieuse de l’humanité, et que la figure de Jésus-Christ attirerait d’autant mieux les respects et la sympathie qu’elle se présenterait moins dans l’éblouissement d’une origine et d’un pouvoir surnaturels.

« Laissez, nous ont-ils dit, tous ces récits merveilleux dont la critique moderne a fait justice et qui répugnent, du reste, à notre raison formée par les méthodes sévères des sciences positives. Ne présentez plus Jésus-Christ tel qu’il vous apparaît transformé par l’enthousiasme de ses disciples, élevé par eux à la droite du Père et participant à l’adoration qui n’appartient qu’à Dieu seul. Qu’y perdrez-vous, d’ailleurs ? Il restera au Christ la gloire unique d’avoir été le plus grand des prophètes, le prédicateur de la religion de l’esprit, l’initiateur de la paternité divine et de la fraternité humaine. Seul parmi les enfants des hommes, il a senti battre en son cœur la certitude de la filiation divine, il a donné à Dieu son vrai nom, celui de Père, il a rétabli entre l’homme et Dieu la relation vraie qui produit dans nos âmes la foi confiante et l’amour. C’est par là qu'il sera toujours à nos yeux le Maitre et le modèle. Dans les incomparables préceptes du Sermon sur la montagne, dans ses sublimes paraboles, dans le spectacle de ses souffrances et de sa mort, il nous montrera ce qu’est la vie humaine lorsque l’amour divin la pénètre, et cet exemple sera d’autant plus contagieux que le Christ, redevenu vraiment notre frère, ne nous apparaîtra plus dans la lumière diaphane d’un crépuscule légendaire, et que nous verrons en lui un fils de l’homme, sujet aux mêmes tentations que nous, et conquérant, par ses luttes morales vaillamment supportées, son titre et sa dignité de Fils de Dieu »

Voilà, mes frères, un langage que nous avons tous entendu et qui, énoncé par des lèvres sincères, ne nous a jamais laissés indifférents ; car dans une époque troublée comme la nôtre, où tant d’esprits se détournent avec un froid dédain de toute espérance éternelle, c’est quelque chose encore, c’est beaucoup que de reconnaître en Jésus-Christ l’initiateur de la vérité religieuse. Aussi, à ceux qui parlent ainsi, nous ne répondrons jamais avec l’accent satisfait et les affirmations sentencieuses d’une orthodoxie qui se croit infaillible ; mais on conviendra que nous serions des aveugles, si nous n’apercevions pas l’immense portée des concessions qu’ils nous demandent. Il s’agit au fond de savoir si le christianisme est un don de Dieu fait à l’humanité, ou s’il n’est que le suprême effort de la conscience humaine. Au lieu de voir en Jésus-Christ, avec l’Eglise entière, la divinité se révélant dans un homme, on nous demande de voir en lui l’humanité divinisée parce qu’elle est arrivée pour la première fois par lui à la pleine possession du divin. Eh bien ! à ceux qui croient qu’à ce prix ils pourront sauver la cause chrétienne, nous dirons, avec l’ardeur d’une conviction profonde, d’abord que leur illusion est énorme, et ensuite que le Christ ramené à des proportions tout humaines est un être bien autrement incompréhensible que le nôtre, dont ils ne veulent plus.

J’ai dit leur illusion, et je m’explique. Ils ont cru, n’est-ce pas, que l’Evangile, dépouillé de tout élément surnaturel, réduit aux simples proportions d’une vie morale, dont le Sermon sur la montagne serait le code éternel, s’imposerait désormais aux consciences et ne soulèverait contre lui aucune révolte de la raison ? Or, j’en appelle à tous ceux de mes auditeurs qui observent de près le mouvement de la pensée contemporaine, est-il vrai que leurs espérances se réalisent à un degré quelconque ? Où sont-ils les prosélytes gagnés à ce nouvel évangile ? où sont-ils les esprits qu’il satisfait au point de les retenir et de leur donner la paix de l’intelligence et du cœur ? Savez-vous ce que, moi, j’observe aujourd'hui ? C’est que ce qu’on attaque le plus sévèrement, le plus dédaigneusement, à cette heure, c’est précisément toute la conception de la morale dont le Sermon sur la montagne est à nos yeux l’expression sublime et populaire. Demandez à nos positivistes, je ne dis pas seulement à ceux qui, dans le silence de l’étude, poursuivent avec une inexorable logique les dernières conséquences de leur système, je dis aux tribuns populaires, à ceux dont j’entendais récemment la parole accueillie par les applaudissements frénétiques de nos ouvriers parisiens, demandez-leur ce qu’ils pensent d’un Dieu Providence, qui nourrit les oiseaux de l’air et revêt les lis des champs, qui compte les cheveux de nos têts et que l’on doit prier avec la naïve confiance d’un cœur d’enfant. Demandez-leur ce qu’ils pensent des béatitudes, demandez à ces apôtres de la rédemption de l’humanité par la science quelle idée ils se font des promesses adressées aux pauvres en esprit ; demandez à ces politiques de quel œil ils voient le triomphe que le Christ annonce aux débonnaires ; demandez à ces réformateurs sociaux quel jugement ils portent sur la compensation éternelle assurée aux affligés et aux persécutés, et, quand vous aurez recueilli leurs réponses toutes frémissantes de mépris et de colère, vous viendrez nous dire s’il suffit d’avoir abandonné la folie de la croix et le christianisme surnaturel pour gagner à l’Evangile les générations de l’avenir.

J’ai donc le droit de dire que l’illusion de ceux que je combats est profonde. J’ajoute (et ceci me ramène aux paroles de mon texte)que le Christ qu’ils nous présentent est un Christ imaginaire que l’histoire ne connait pas. En effet, quand on veut savoir ce qu’a été Jésus-Christ, il y a quelqu’un qu’il faut interroger avant tous les autres, c’est Jésus-Christ lui-même ! Eh bien ! nous allons entendre son témoignage. Recueillons-le, mes frères, et, de crainte d’accorder trop à l’enthousiasme de ses disciples, ne consultons, si vous le voulez, ni saint Paul, dont les lettres, cependant, d’une authenticité incontestée, sont les plus anciens documents historiques du christianisme primitif, ni saint Jean ou son école, dont la pensée mystique a, dit-on, idéalisé Jésus ; tenons-nous en à ces trois premiers évangiles qui sont l’écho fidèle du ministère du Christ en Galilée et de son épilogue sanglant à Jérusalem. Vous les savez par cœur, mes frères ; or, j’en appelle chez vous à cette impression première que n’a altérée encore aucune analyse critique. Est-il vrai que le Christ tel qu’il nous y apparaît ne soit qu’un humble Israélite parvenant, à travers les luttes morales de la vie et par l’étude des anciens prophètes, à sentir vivrer pour la première fois dans son cœur la certitude de la paternité divine et de la fraternité humaine, et fondant ainsi, par l’effort spontané de son génie, cette réalité magnifique qui s’appelle e Royaume de Dieu ? Je ne préjuge pas votre réponse, mais voici la mienne. A mes yeux, le Christ de Matthieu, de Marc, de Luc, comme celui de Paul, comme celui de Jean, est un Etre qui, dès qu’il paraît, agit et parle en roi. C’est là ce que je veux vous montrer.

Délimitons notre sujet. Le domaine dans lequel se meut Jésus-Christ est un domaine exclusivement religieux ; dans tout ce qu’il enseigne et dans tout ce qu’il fait, il ne s’occupe que des rapports de l’homme avec Dieu, et de l’homme avec l’homme. il ne touche ni aux questions sociales, ni aux questions politiques. Jamais il ne s’engage dans cette région des choses terrestres et transitoires, ou des vérités scientifiques que Dieu a livrées à la libre investigation des hommes. Et (pour le dire en passant) c’est parce que l’Evangile n’a contracté aucune alliance avec les puissances de cet ordre, c’est parce qu’il n’a épousé aucune politique, aucun système social, aucune cosmogonie, aucune philosophie, qu'il prouve qu’il s’adresse à l’homme lui-même dans ce que l’homme a de central et d’essentiel, qu’il peut s’adapter à tous les temps et à toutes les races, qu’il est universel et qu’il est toujours actuel. Quand donc j’affirme que Jésus-Christ a prétendu à la royauté, il s’agit d’une royauté qui n’est ni de l’ordre temporel, ni de l’ordre intellectuel ; il faut, comme le dit Pascal dans une page sublime, nous élever à une sphère plus haute que celle des Alexandre et des Archimède, il faut nous placer sur le terrain moral et religieux. C’est là que Jésus-Christ m’apparaît comme un roi.

Il l’est, dans la manière dont il enseigne les intelligences, dont il juge les consciences, dont il se pose en maître des cœurs ; il l’est enfin dans l’exercice du pouvoir surnaturel qu’il prétend posséder. C’est sous ces quatre aspects que nous allons l’étudier.

 

1

Ecoutez-le tout d’abord quand il enseigne. Comparez son attitude à celle des philosophes, des plus grands de tous, de Socrate par exemple. on connait le fameux parallèle de Socrate et Jésus-Christ qu’a tracé Jean-Jacques Rousseau. Sur un point, ce parallèle est erroné : la mort de Jésus n’a pas été plus calme que celle du sage d’Athènes ; ce n’est pas de sérénité qu’on peut parler devant la croix du Calvaire sur laquelle a retenti l’Eli sabachtani qui échappe au Rédempteur expirant. Ayons le courage de le dire : la mort de Jésus a été une mort pleine d’angoisse ; mais c’est cette angoisse même qui en fait pour tous les croyants une source éternelle d’ineffable paix. a cet égard donc, la comparaison faite par Rousseau est impossible. Mais, entre l’enseignement de Socrate et celui de Jésus-Christ, combien elle reste saisissante ! Socrate est un homme qui a mesuré son ignorance, et qui, avec la candeur d’une conscience droite et d’un bon sens élevé jusqu’au génie, essaie de découvrir la loi de sa destinée. Pour cela, que fait-il ? Il observe, il analyse les actions humaines et les mobiles qui les inspirent. Sous les raisonnements des sophistes, il cherche les vraies lois morales, il réunit ces matériaux sur lesquels la synthèse puissante de son disciple Platon va élever une philosophie admirable, mais pleine d’hypothèses subtiles, de conjectures ingénieuses, de fantaisies bizarres, et qui n’est après tout que le plus sublime effort de la curiosité humaine cherchant à sonder l’infini.

Après Socrate, écoutez Jésus-Christ. Où est chez lui l’effort de la raison qui cherche ? A quel signe reconnaissez-vous, dans son langage, le travail de l’intelligence arrivant à saisir la vérité ? Où sont les hésitations, les conjectures, les angoisses, les doutes qui accompagnent chez l’homme l’enfantement des convictions profondes, et qui apparaissent en raison même de l’intensité de ces convictions ?  Dès ses premiers pas, Jésus affirme ; jamais sa parole ne monte de la terre comme l’élaboration suprême d’une âme sainte en travail ; toujours elle descend d’en haut avec l’autorité d’une révélation. C’est cet accent d’autorité qui frappa la foule sur la montagne des béatitudes et qui reste à travers les siècles son caractère distinctif et souverain. Qu’il s’agisse de Dieu, de sa nature, de sa sainteté, de sa miséricorde, du vrai culte qui doit lui être rendu, qu’il s’agisse de l’homme, de la valeur éternelle de chaque âme, de l’obéissance intérieure et spirituelle, de la loi de justice et de charité qui doit relier entre eux tous les êtres, qu'il s’agisse de notre destinée immortelle, de la vie à venir et du jugement suprême, Jésus parle en maître, et sur chacun de ces sujets il dit le mot vrai et définitif qui va réveiller un écho au fond de la conscience humaine dans tous les temps, chez toutes les races et sur tous les points de la terre.

On nous répondra sans doute que sur les lèvres d’un fils d’Israël cet accent d’autorité n’a rien d’étrange, et qu’à cette race formée par la loi et par les prophètes, il ne faut pas demander le langage de la philosophie ni les procédés de la dialectique qu’elle n’a jamais connus. Admettons ce que cette remarque a de légitime et comparons Jésus, quand il enseigne, non pas au plus grand des Grecs, mais à un autre fils d’Israël, que nous tenons, nous, chrétiens, pour inspiré, et qui a cru avec une énergie sans pareille à sa propre inspiration, à ce disciple de la loi et des prophètes qui s’appelait Saul de Tarse. Si jamais homme a été convaincu de sa mission divine, si jamais homme a mis au service de sa foi une âme ardente et sincère, c’est bien celui-là ; son action a été telle qu’on a prétendu aujourd'hui lui donner cette gloire qui, à ses yeux, eût été un blasphème, d’avoir été le vrai fondateur du christianisme. Eh bien ! c’est quand on le compare à son Maître, que l’on mesure toute la distance qui sépare Celui qui a possédé la vérité au point de dire : « Je suis la vérité », de celui qui a été possédé par elle au point d’en devenir le plus ardent apôtre.

Oui, c’est chez Paul que nous pouvons étudier ce travail intérieur, ces angoisses, ce drame spirituel, que je cherche vainement chez Jésus ; lisez ces lettres dont le style si original, si personnel et si vivant, garantit à jamais l’authenticité. Sous ce style heurté, frémissant, parfois incorrect, sous ces phrases tourmentées, sous ce langage qui éclate comme un vase impuissant à contenir un vin nouveau qui bouillonne et déborde, je sens une âme inspirée, mais une âme d’homme après tout, qui s’efforce de raconter dans sa langue les choses magnifiques de Dieu. Certes,  je m’incline devant l’apôtre, je reconnais dans ses paroles le message d’un témoin fidèle de l’Evangile ; mais avec l’apôtre lui-même je m’incline devant Celui que Paul appelle son Seigneur et son Maître ; devant Celui qui oppose à la loi ancienne son autorité souveraine, qui  parle du ciel comme un Fils parlerait de la maison de son Père, qui dit : « Nul ne connaît le Père que le Fils », qui affirme que les cieux et la terre passeront, mais que ses paroles ne passeront point ; devant Celui enfin qui, dans l’ordre de la révélation religieuse, parle toujours et agit en roi.

 

2

 

Cette royauté qui me frappe en Jésus-Christ lorsqu’il révèle la vérité religieuse, je le retrouve, en second lieu, dans l’attitude qu’il prend vis-à-vis des consciences dont il se proclame partout le Maître et le Juge.

Considérez un moment à ce point de vue la thèse que je combats. On nous dit que Jésus, simple fils de la Galilée, a, par ses expériences et ses luttes, conquis peu à peu la possession de la paix intérieure et de la vérité religieuse dont il a été l’initiateur, le témoin et le martyr ; on nous dit que c’est en l’envisageant ainsi, en dehors de toute préoccupation surnaturelle, qu’on peut le mieux le comprendre et l’aimer. Il encore, interrogeons Jésus-Christ, et voyons quelle est l’impression vraie qu’il produit sur nos âmes.

Nous sommes tous d’accord sur un point, c’est que la loi morale prêchée par lui est la plus spirituelle et la plus sainte que le monde eût encore entendue. Elle ne juge pas seulement les paroles ou les actes, elle atteint le sentiment même dans ses intimes profondeurs ; c’est une lumière inexorable qui pénètre dans les derniers replis des cœurs ; elle voit le meurtre non pas seulement dans l’acte, mais dans la haine, que dis-je ? dans l’égoïsme qui laisse mourir celui que l’on pourrait sauver ; elle découvre l’adultère dans un regard impur, elle ordonne une sainteté et une justice dont Dieu puisse être le témoin secret. Elle ne commande pas seulement l’abstention du mal, ms l’accomplissement du bien, non pas dans son accomplissement extérieur seulement, mais la consécration complète de l’être intérieur, l’obéissance absolue à ces deux commandements : « Tu aimeras Dieu de toutes les puissances de ton être, tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Elle dit aux hommes : « Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait ».

Or, je supplie ceux qui m’écoutent de faire ici deux choses : un effort suprême de sincérité et un retour sur eux-mêmes. Vous croyez, n’est-ce pas ?  que cette loi que le Christ prêche est la vraie ; votre conscience en la contemplant frémit d’un assentiment sublime ; vous comprenez que, si Dieu a révélé aux hommes la loi de leur destinée, c’est ainsi qu’il a dû leur parler. Si, du haut de cette chaire, j’allais diminuer cette loi pour la mettre à votre portée ; si je vous disais que Dieu se contente d’une demi-pureté, d’une honnêteté selon les formules du code, d’un amour et d’un dévouement mesurés sur les exigences de notre égoïsme ; si je vous disais qu’on peut le satisfaire avec cette morale mondaine, avec ces vertus d’apparat, espèce de fausse monnaie courante que nous échangeons tous sans avoir d’illusion sur sa valeur, vous jugeriez sans doute que de telles déclarations peuvent procurer à un prédicateur une popularité facile, mais vous les accueilleriez avec un secret mépris, et les plus vicieux, d’accord sur ce point avec vous, diraient que je trahis mon mandat. Ainsi, pas d’hésitation ! A notre conscience il ne faut pas moins que la loi spirituelle et sainte que le Christ proclame. Et, cependant, cette loi, qui de nous l’a accomplie ? Qui de nous peut l’accomplir ? Quel est l’homme dans cette assemblée qui soit resté pur, je ne dis pas seulement dans ses actes, je dis dans les pensées de son cœur ? Et nos actes eux-mêmes, quel est celui d’entre nous qui voudrait qu’ils apparussent au grand jour ? Quel  est l’homme qui n’a été épouvanté parfois en voyant ce qu’un cœur peut abriter de souillures, de petites perfidies, d’orgueil, de haine, de lâcheté ?

Ah ! pharisiens que nous sommes, qui marchons le front haut devant nos semblables et qui recueillons souvent leurs éloges, ,s sommes-nous demandé ce que nous deviendrions si notre vie cachée apparaissait dans une inexorable lumière aux yeux de nos semblables, et si ceux-ci nous jugeaient d’après les maximes que nous professons tous les jours ? Voilà ce que confessent avec angoisse tous les hommes qui ne veulent ni s’aveugler sur eux-mêmes, ni renier la loi de perfection. Et ce st les meilleurs qui le diront dans cet auditoire. Tandis que les âmes mondaines, frivoles ou engagées dans la servitude d’une passion coupable, sortiront d’ici en disant que nous exagérons, que nous calomnions la nature humaine, celles-là s’accuseront les premières qui accomplissent dans le silence les œuvres de la sanctification cachée et de la charité. Toujours il en a été ainsi. Si vous voulez recueillir les aveux les plus poignants, la confession la plus émue et la plus douloureuse de la lumière humaine, c’est aux âmes d’élite qu’il faut les demander ; le même regard qui leur fait entrevoir les cimes immaculées de la perfection morale, leur révèle la profondeur de l’abîme qui les en sépare encore : témoin, entre mille autres, ce saint Paul que je citais tout à l’heure, l’une des âmes à coup sûr les plus vaillantes, les plus saintes, les plus aimantes que le monde ait jamais connues, et qui, dans la description saisissante qu’il fait de ses luttes intérieures entre la loi de l’esprit et la loi du péché, laisse échapper ce cri d’angoisse : « Misérable que je suis ! Qui me délivrera de ce cadavre ? »

Maintenant, examinez le phénomène en face duquel nous sommes placés. Voici devant nous un Etre qui, sans une hésitation, sans une recherche, sans un doute, annonce aux hommes cette loi de la perfection, qui, depuis sa venue, ne peut plus être reniée par la conscience humaine. Cet homme, en la prêchant, a le sentiment absolu de l’avoir toujours accomplie. Lui qui arrache à l’humanité l’aveu de sa misère et qui trouble les consciences jusque-là les plus paisibles, il n’a jamais confessé ses péchés, il n’a jamais laissé échapper un remords, un cri de repentir, ou l’aveu d’un regret. Pas une ride, même la plus légère, n’a effleuré la surface de sa propre conscience. Il s’est cru saint, absolument saint, et ses disciples, témoins de sa vie intime, l’ont appelé le Saint et le Juste. Dans les récits qu’ils nous ont laissés de son ministère, récits dont le style simple, naïf et sans apprêt, montre assez qu’ils n’ont pas obéi, en les écrivant, à un plan préconçu, il se trouve qu’ils ont retracé une vie dans laquelle l’œil pénétrant de la critique n’a pu découvrir, je ne pas aucun crime, je dis aucune faute, aucune défaillance, aucune faiblesse, aucun trait vulgaire. Tous les actes, toutes les pensées, tous les sentiments de cet homme ont été la réalisation constante de la loi idéale d’amour et de sainteté. Non seulement cet Etre affirme sa perfection, mais, dès qu’il paraît, il s’érige en maître absolu des consciences ; il lie et il délie, il renvoie les pécheurs absous par une sentence souveraine, il sauve ou il condamne ; c’est devant son tribunal que toutes les âmes devront comparaître un jour, et il suffira qu’il leur dise : « Je ne vous ai jamais connues », pour que ce mot décide de leur avenir éternel.

Voilà bien, n’est-ce pas ? le vrai Christ, non pas seulement celui de Paul et de Jean, mais celui des trois premiers évangiles, des documents les plus authentiques et les plus incontestés. Eh bien ! que devient devant cette figure la théorie du jeune Galiléen arrivant, par un lent travail intérieur, à posséder la paix, le pardon, le sentiment de l’adoption et de la filiation divine ? S’il n’est qu’un homme, qu’on me dise comment il a conquis la paix morale, qu’on me montre les traces de ces luttes intérieures qui ont dû accompagner chez lui l’enfantement douloureux de sa parfaite sainteté ! Qu’on m’explique ce rôle de Juge et de Maître, prononçant sur tous les hommes une sentence suprême dont l’éternité verra l’accomplissement ! Mes frères, depuis dix-huit siècles, la conscience chrétienne a résolu cette question, et l’on ne réformera plus son verdict.  Elle a senti qu’il y avait là une sainteté et une autorité qui ne venaient pas de la terre, elle a salué dans le Christ son prophète et son roi.

 

3

 

Cette royauté qui nous a frappés dans la manière dont il révèle la vérité, et dont il juge les consciences, m’apparaît en troisième lieu et avec plus de force encore quand je vois la place qu’il revendique dans l’amour et la vie de ceux qui viennent à lui. Il faut donner à ce fait toute sa portée. Sans doute, il est naturel que Celui qui a dit aux hommes : « Aimez-vous les uns les autres », ait dû vouloir être aimé. Mais qu’on y prenne garde ! Nous apprenons à l’école de Jésus-Christ deux choses : l’amour de l’homme et ce qu’on a appelé dans la langue religieuse le détachement de la créature. Comment concilier ces deux devoirs ? Mes frères, la contradiction entre eux n’est qu’apparente. Le christianisme a voulu établir la hiérarchie dans les affections ; dans le monde du cœur, comme partout, il a fondé le règne de la loi. Il a rendu à Dieu sa place et il a remis l’homme à la sienne. Oui, c’est l’amour qui doit relier toutes les créatures, mais en les reliant toutes ensemble à Dieu. Dieu, voilà l’Etre unique qui peut posséder notre amour dans sa plénitude. Aux êtres créés, nous ne devons le donner qu’en partie, et si l’un d’eux l’absorbait tout entier, ce serait le désordre et l’idolâtrie ; aussi, plus la créature est sainte, plus elle est élevée dans l’échelle morale des êtres, plus elle craint d’attirer l’hommage qui n’est dû qu’à Dieu seul ; elle s’humilie, elle s’efface, elle s’écrie : « Non pas à moi, non pas à moi, Seigneur, mais à ton nom donne gloire. » Ainsi se réalise cette hiérarchie des êtres qu’entrevoyait le vieux Pythagore, lorsqu’il disait que l’harmonie était la loi du monde. De cette vision passagère du génie, Jésus-Christ a fait la religion de l’humanité.

Eh bien ! dans cette hiérarchie des êtres, quelle est la place que revendique Jésus-Christ lui-même ? Que prétend-il  être au milieu des hommes ? J’interroge les évangiles et ils me répondent : Jésus-Christ ne prétend à rien moins qu’à être le but suprême de tout amour et la source profonde de toute vie. Dès ses premières paroles publiques, il déclare que c’est pour l’amour de lui que ses disciples seront persécutés. Peu à peu il leur révèle toute la grandeur de son rôle et de sa personne. Par cette lente méthode éducatrice qui est la sienne, et qui ne consiste point à imposer la vérité par des formules, mais à en faire naître dans les cœurs le sentiment et l’intelligence, il les prépare à comprendre ce qu’il est. Ce n’est qu’après un an et demi d’enseignement qu’il leur pose cette question décisive : « Qui dites-vous que je suis ? » et qu’il déclare que son Eglise reposera sur la confession que Pierre en lui répondant a faite de sa divinité. Il dirige sur sa propre personne les regards, l’attention, la foi de ses disciples ; c’est à lui qu’il faut venir, c’est en lui qu’il faut croire, c’est lui qu’il faut aimer. Toutes les affections doivent se subordonner à cette affection dominante, tous les liens de la chair et du sang doivent être rompus s'ils s'y opposent, et, comme pour faire entrer de vive force cette vérité dans les cœurs, Jésus ne recule pas devant le plus formidable des paradoxes : « Quiconque ne hait pas son père et sa mère, quiconque ne hait pas sa propre vie, ne peut être mon disciple. » Ici encore, veuillez le remarquer, je ne cite que les témoignages des trois premiers évangiles. Que serait-ce si j’en appelais à saint Jean, qui a pénétré plus que tous les autres dans les profondeurs de l’âme de son Maitre ? Que serait-ce si j’avais le temps de vous montrer saint Paul donnant au Christ toutes les énergies, tous les élans, toutes les adorations de son cœur ?

Et, de même que Jésus réclame tout amour, il se révèle comme la source de toute vie. De sa personne, en effet, va découler dans désormais une source intarissable de vie et de sainteté. Songez à ce qu’il y a dans ces simples mots : « Venez à moi ! » adressés à tous les affligés de la terre, et dans cette promesse aussi magnifique que surhumaine : « Vous trouverez le repos de vos âmes ». C’est dans la même pensée qu’il fonde la sainte Cène, conviant ainsi tous les croyants de l’avenir à contempler sa chair rompue et son sang versé pour les péchés du monde, et faisant de son sacrifice l’éternel objet de leur foi ; c’est dans la même pensée enfin que, lorsqu’il va quitter ses disciples, en ce moment suprême, où, ayant achevé son œuvre, il devait, s’il n’avait été que le plus grand des prophètes, s’effacer et diriger leurs regards vers Dieu seul, il leur adresse ces mots qui vont, à travers les siècles, soutenir tous les croyants de l’avenir : « Voici, je suis tous les jours avec vous jusqu’à la fin du monde ».

 

4

 

Ce n’est pas seulement par sa parole que Jésus affirme sa royauté religieuse, c’est encore dans ses actes, c’est dans l’ordre des faits. Il agit autant qu'il enseigne, et, dans l’action comme dans l’enseignement, il déploie une puissance souveraine à laquelle il faut donner le seul nom qui convienne, celui de surnaturelle. Nous touchons ici à une question actuelle et brûlante. Plus elle est aujourd'hui controversée, plus je sens le devoir de l’aborder franchement et sans réticence.

Que Jésus-Christ ait prétendu à un pouvoir surnaturel, c’est ce qui ressort de tous les textes évangéliques sans aucune exception, et je n’ai pas besoin de m’arrêter à en faire la preuve. Ce ne sont pas seulement les lettres de saint Paul qui l’affirment, ce sont les documents les plus anciens et les plus authentiques dans lesquels la critique la plus prévenue est obligée de reconnaître l’écho fidèle de son ministère. Admettons que, comme plusieurs le pensent aujourd'hui, le récit de saint Marc constitue ce qu’on peut appeler l’Evangile primitif, tout le monde reconnaîtra que, du commencement à la fin, il nous raconte l’activité miraculeuse de Jésus-Christ. On nous dira dans doute que tous ces traits merveilleux ne sont que la création spontanée de l’imagination populaire juive, qui ne pouvait se représenter un héros religieux sans le parer de l’auréole du thaumaturge. Mais un fait donne à cette assertion un démenti péremptoire, et nous prouve que nos évangélistes savaient fort bien résister à cet entraînement. Il y a eu, au premier siècle de notre ère, un prophète qui a joui d’une popularité immense, un homme dont le rôle a été tel que l’historien Josèphe, qui semble avoir à peine connu Jésus-Christ, lui a fait au contraire une grande place : cet hommes, c’est Jean le Baptiste, que juifs et chrétiens ont également vénéré. Or, nous ne voyons pas que les évangiles lui aient jamais attribué d’acte miraculeux ; ils nous retracent d’une manière précise et saisissante son ministère, sa prédication, sa mort, sans y mêler un seul trait surnaturel, ce qui prouve qu’ils pouvaient concevoir une mission divine authentique sans l’accompagner de prodiges. Puis, lorsqu’ils arrivent à Jésus, c’est toute autre chose, et, à chacune de leurs pages, nous nous trouvons en présence d’actes qui supposent un pouvoir absolument surhumain. Est-ce à dire que leur langage change, que leurs récits deviennent dès lors moins précis, plus nuageux, plus légendaires, et qu’on y sente moins la marque de témoins qui ont vu, qui ont entendu ce qu’ils racontent ? Au contraire, ces mêmes évangiles nous donnent de Jésus, de son caractère, de son attitude, de son enseignement, une peinture si vivante, si originale, si puissante, qu’elle a traversé les siècles ; ils nous conservent de lui des paroles d’une telle grandeur, que leur authenticité s’impose à tout esprit qui n’est pas aveuglé par des préventions misérables. Chacun sent que ces maximes si profondes et si pénétrantes, que ces réponses qui vont au fond des choses, que ces paraboles d’un style si pur et si merveilleusement original, que ces discours ont été réellement prononcés et fidèlement reproduits ; or, beaucoup de ces paroles sont entrelacées d’une manière tellement étroite aux actes de Jésus, à ses guérisons, à ce que nous appelons ses miracles, qu’il est impossible d’imaginer une trame plus serrée et plus compacte.

(…)  cette séparation entre le surnaturel et le réel, je constante qu’on ne peut l’opérer dans l’histoire du Christ sans le défigurer et sans faire de lui un être inexprimable et parfois monstrueux. De deux choses l’une en effet : ou les actes qu’il a accomplis sont réels, ou ils sont purement imaginaires. S’ils sont réels, et si l’on nie leur caractère surnaturel, on est réduit à n’y voir que les tours de force d’un thaumaturge habile qui en impose à la foule crédule : explication misérable que la critique ne peut appliquer qu’en recourant elle-même à des tours de force de subtilité, et qui jure tellement avec la sublimité morale du Christ, qu’elle ne satisfera jamais les consciences élevées ni même le simple bon sens vulgaire. Si ces actes sont imaginaires, la difficulté n’en reste pas moins insoluble, car alors il faut admettre ceci : c’est que ses biographes qui nous ont transmis avec une fidélité scrupuleuse tant de paroles, tans de discours même étendus qu’ils ne pouvaient avoir inventés, puisque l’enseignement qui y est renfermé dépassait absolument leur portée, se sont mépris tout à coup et ont été victimes de leur propre imbécillité ou des hallucinations les plus fantastiques, quand ils ont, dans les mêmes pages, raconté les actes de Jésus. Et, cependant, ces actes étaient infiniment plus faciles à vérifier que des paroles, puisqu’ils tombaient sous les sens de ceux qui en étaient les témoins.

Le problème, vous le voyez, est inextricable et désespérant. Aussi avons-nous le droit de conclure sur ce point que, si  l’on refuse d’admettre les miracles de Jésus-Christ, ce n’est nullement parce que le témoignage historique leur fait défaut, c’est avant tout pour des raisons préconçues, c’est parce qu’on a érigé en dogme l’impossibilité du surnaturel. Examinons un moment ce prétendu axiome et voyons ce que nous devons en penser.

La notion du surnaturel subit en ce moment un discrédit tel que beaucoup d’esprits la croient à jamais ruinée. « On peut prévoir le jour, écrivait récemment M. Renan, où la croyance aux faits surnaturels sera dans le monde quelque chose d’aussi peu considérable que l’est aujourd'hui la foi aux sorciers et aux revenants ». La cause de ce discrédit est complexe. Elle tient surtout à la méthode à laquelle Auguste Comte a donné le nom de positive, et qui consiste à exclure de la science toute explication métaphysique et religieuse pour s’en tenir aux faits rigoureusement observés. Grâce à sa simplicité apparente, cette méthode est aujourd'hui triomphante ; mais il reste à savoir si elle suffit à expliquer notre destinée morale et religieuse ; or, c’est là ce que nous nions énergiquement.

Il y a un système, aussi vieux qu’Epicure, et qui consiste à soutenir que la nature suffit à s’expliquer elle-moi-même, que tout dans la nature se réduit à la matière et à ses propriétés. Ce système très logique et très connu, c’est le matérialisme. Il est évident que ceux qui l’acceptent n’ont que faire du surnaturel, ni de Dieu, ni d’une cause première, ni de la liberté morale, ni d’une vie future, ni de la religion. Tout est ramené par eux à une seule substance, la matière ; à un seul principe,  la force, qui, dans ses évolutions successives, a produit le monde tel qu'il nous apparaît.

Je ne discute pas ce système. Je constate simplement la vogue immense dont il jouit aujourd'hui. Ce n’est point, d’ailleurs, à des matérialistes que je m’adresse ; c’est à des hommes qui admettent que la pensée n’est pas le résultat d’un déplacement de molécules, que l’esprit est d’un autre ordre que la matière, que la liberté morale est une réalité, que le monde ne se conçoit pas sans une Cause suprême, intelligente et parfaite. Il semble que ces hommes, en vertu de ces prémisses même, devraient être logiquement conduits à accepter la notion du surnaturel. Et, cependant, c’est parmi eux que je rencontre quelques-uns de ses adversaires les plus résolus. Ce n’est pas qu’ils en nient la possibilité théorique. L’idée même qu’ils se font de la liberté et de la toute-puissance de Dieu ne leur permet pas de rendre le Créateur esclave de lois qu’il a faites, mais cette simple possibilité vide et nue ne peut lutter contre la répugnance que leur raison formée par nos méthodes positives éprouve à admettre la réalité de faits miraculeux. Qu'ils me permettent de leur dire que cette répugnance n’est pas digne d’esprits philosophiques, et que ceux-là seuls sont vraiment indépendants qui savent résister au courant de leur époque !

Voici quel est l’argument favori qu’ils allèguent.  Ils en appellent à l’impression générale que produit sur nous l’histoire religieuse de l’humanité ; ils nous disent que toutes les religions, quelles qu’elles soient, se présentent, à leur origine, avec un cortège de faits merveilleux, que cette prétention est nulle, par cela même qu’elle est universelle, qu’elle prouve simplement une chose : l’aberration de l’imagination humaine surexcitée pour l’idéal religieux ; ils nous demandent pourquoi nous-mêmes qui opposons une fin de non-recevoir instinctive aux légendes de toutes les mythologies, nous prétendons faire une exception en faveur des légendes évangéliques, pourquoi nous réclamons pour le Christ ce que nous refusons à tous les soi-disant thaumaturges de l’antiquité et des temps modernes.

L’objection est spécieuse. Voyons si elle est aussi péremptoire qu’on le prétend.

Il est incontestable que toujours et partout l’homme a cru que, si la divinité intervenait dans ses destinées, cette intervention devait se manifester par des actes qui, à travers les causes secondes, laisseraient entrevoir la cause première et souveraine. Cette présomption a, cela est également certain, donné naissance à une multitude innombrable d’absurdités et de faits légendaires. S’ensuit-il qu’elle soit fausse ? Voilà la vraie question. Eh bien ! pour moi, je l’avoue, cette présomption a une valeur très grande, non seulement parce qu’elle est universelle et qu’il est toujours fort peu philosophique de méconnaître une aspiration de la conscience humaine qui s’est produite toujours, et partout, mais encore parce qu’elle est justifiable en raison ; parce que, s’il y a un Dieu, si ce Dieu veut se faire connaître et fonder son règne, il semble impossible qu’il ne se révèle pas comme le Maitre de la nature, comme l’Etre souverain et tout-puissant. Ecarter le surnaturel religieux, à cause des aberrations qu’il a produites, est un parti pris indigne d’un esprit sérieux. Autant vaudrait écarter la prière, l’adoration, l’espérance d’une vie future, la religion, en un mot, par le seul motif que ces manifestations de l’âme humaine ont été fort souvent bizarres, fantastiques et parfois monstrueuses. Or, de même qu’ici comme partout nous distinguons le vrai du faux, et l’idéal de ses perversions grossières, de même en face des faits surnaturels de l’Evangile si clairement attestés par ses premiers témoins, notre devoir est, non pas de procéder par des négations arbitraires, mais de chercher si ces faits ne révèlent pas une intervention de Dieu dans l’histoire de l’humanité.

A cette considération déjà si forte, vient s’en joindre une autre. L’étude de la nature nous révèle dans toute la création ce qu’on peut appeler une série ascendante. Au bas, c’est la matière chaotique régie par des lois purement mécaniques, puis, au-dessus, c’est la vie d’abord végétative, ensuite douée de mouvement, d’instinct et d’une conscience confuse qui s’élève peu à peu jusqu’à l’intelligence, jusqu’à la moralité. On nous dit aujourd'hui que cette progression ascendante est le simple résultat d’une évolution qui s’est poursuivie pendant des milliards d’années ou de siècles. Je laisse de côté cette hypothèse que je n’ai pas à discuter, et je constate simplement qu’à chacun de ces degrés nous pouvons observer une manifestation nouvelle de la vie, qui est surnaturelle à l’égard de la précédente, parce qu’elle s’affirme par des phénomènes que la précédente n’aurait pu produire. Il est évident, en effet que, lorsque la vie apparaît dans un milieu où ne régnait jusque-là que le simple mécanisme, la vie amène avec elle des phénomènes de l’ordre biologique ; la vie dans l’animal aura ses manifestations supérieures à celles que l’on voit dans la végétation.

Supposez maintenant que l’homme apparaissant dans un milieu où l’animal seul l’avait précédé : il y exercera aussitôt une puissance d’un ordre nouveau ; il modifiera l’effet des lois de la nature ; il fera servir une force brutale à une fin déterminée et intelligente. Il suspendra la loi de la gravitation ; il greffera sur un arbre un rameau que cet arbre n’aurait jamais produit ; il créera dans la série animale, par le croisement des espèces, un type inconnu jusque-là. Le règne humain se reconnaîtra donc à des phénomènes qui seront surnaturels pour celui qui ne connaitrait que les forces mécaniques, que les manifestations de la vie végétative ou animale. Eh bien ! supposons que nous nous élevions à une sphère plus haute encore, qu’au-dessus du règne humain nous admettions cette réalité que Evangile appelle le règne de Dieu au milieu des hommes,  je dis que l’avènement de ce règne entraînera avec lui, par une irrésistible analogie, des phénomènes attestant la souveraineté de l’esprit sur la matière et de la sainteté sur le mal.

A cette raison s’en ajoute une troisième, plus puissante encore et à nos yeux décisive. L’optimiste le plus superficiel peut seul prétendre que la nature, telle que nous la contemplons dans l’homme, soit dans son état normal et vrai ; le désordre est partout, dans le domaine de l’intelligence sous la forme de l’erreur parfois monstrueuse, dans le domaine de la conscience sous la forme du mensonge, dans le domaine du cœur sous la forme de l’égoïsme ou des affections déréglées, dans le domaine physique sous la forme de la sensualité, de la difformité ou de la douleur. Aux sophistes volontaires qui disent que tout est bien, l’humanité répond par le cri de ses souffrances. A ceux qui affirment que le mal doit être, elle répond par l’éclatante protestation des consciences et par la douloureuse confession de sa misère, car l’âme humaine a, comme l’Océan, ses marées, et au flux montant de ses crimes correspond le flux descendant de ses remords. Si le mal n’était chez nous que le simple héritage d’une nature animale primitive, nous le commettrions naturellement, mais l’homme n’est pas une brute ;  aussi, lorsqu’il devient une brute, il descend plus bas que la brute elle-même. Il fausse sa nature, il la pervertit, il va jusqu’au sous-naturel, jusqu’au contre-naturel. Si donc la rédemption de l’humanité doit se faire, elle se fera par le rétablissement de la vraie nature créée à l’image de Dieu. Le sous-naturel appelle invinciblement le surnaturel.

Or, ce que nous appelons le surnaturel dans l’œuvre de Jésus-Christ, qu’est-ce, si ce n’est avant tout la restauration de la nature humaine, dans son état normal, telle qu’elle a été voulue de Dieu ? C’est ce caractère si profondément moral qui distingue à jamais les miracles du Christ de tant de faits légendaires, enfantés par la recherche du merveilleux. Cette recherche du merveilleux, nul ne l’a condamnée plus sévèrement que le Christ lui-même ; nul n’a dit plus clairement que lui que le prodige seul est inutile, et c’est parce qu’il le pensait que toujours il s’est refusé de faire parade de son pouvoir divin. Rien, absolument rien chez lui n’éveille l’idée d’un thaumaturge ; ses actes sont simples et sublimes comme ses paroles, et dans les uns comme dans les autres, c’est avant tout le Rédempteur qui se manifeste. Mais la rédemption qu’il veut accomplir a pour objet la nature humaine tout entière, corporelle et spirituelle à la fois. J’insiste sur ce mot de corporelle, car le christianisme, en opposition à toutes les religions de l’Orient et aux philosophies antiques, n’a jamais placé dans le corps le principe du mal et a prétendu sanctifier et sauver l’homme entier.

Eh bien ! comment cette restauration de la nature intégrale aurait-elle été accomplie par le Christ, s’il s’était borné à enseigner, s’il n’avait pas agi, s’il n’avait pas touché de ses mains divines les aveugles-nés, les démoniaques et les lépreux ? Quoi ? vous trouvez bon que, dans ses discours, Jésus-Christ proteste contre l’insolent triomphe de la violence, contre les perversions de la justice et du droit, contre le mal moral dans sa triple manifestation : sensualité, égoïsme, orgueil ; vous êtes émus lorsqu’en face des ruines de l’œuvre divine, si profondément altérée, il trace devant vous les grandes lignes du Royaume de Dieu ; dans ce langage vous reconnaissez le révélateur de la vérité religieuse ; or, de quel droit et en vertu de quelle idée préconçue lui interdirez-vous de réaliser dans les faits ce qu’il proclame dans ses paroles ? Faut-il donc qu'il reste impuissant devant la souffrance physique, et qu'il se borne à contempler avec une sympathie stérile la hideuse maladie qui flétrit le lépreux, le regard éteint de l’aveugle ou les traits bouleversés qui trahissent la terreur et l’angoisse du misérable possédé ? Faut-il qu'il demeure désarmé vis-à-vis de la mort ? Faut-il qu’à son tour il la subisse, vaincu par elle comme tous les enfants des h mais, lançant au monde, pour dernier adieu, une protestation théorique à laquelle répond l’implacable ironie d’une nature immuable soumise à l’éternelle fatalité du mal ?

Ce n’est point ainsi que le christianisme a compris l’œuvre de la rédemption ; il nous montre en Jésus-Christ un être qui est vraiment le fils de l’homme, soumis à toutes les conditions de l’humanité ; un être qui grandit, lutte et se sanctifie ; mais en même temps un être qui, par ses actes comme par ses paroles, nous révèle l’intervention de Dieu dans l’humanité ; un être qui, toujours et partout, affirme la souveraineté de l’esprit sur la matière, de la sainteté sur le mal, de la vie enfin sur la mort.

Voilà, mes frères, le Christ des évangiles et de tous les évangiles, le Christ des apôtres et de tous les apôtres, le seul dont la vie s’explique sans mutiler aucun des textes qui nous l’ont conservée, le seul qui ait pu fonder sur la terre une Eglise, le seul que la conscience des croyants puisse admettre jamais. Et l’on s’étonne que nous protestions avec énergie contre les théories qui ne voient dans son histoire qu’un amalgame incohérent de légendes et de vérités, de perfection morale et de prodiges suspects, de grandeur divine et de faux miracles, comme si l’on pouvait démembrer cette Unité vivante, et faire de cette figure sublime un assemblage d’éléments informes et monstrueux. Veut-on ne voir en lui qu’un homme, veut-on élaguer de sa vie tout ce qui nous semble surnaturel, alors il faut soumettre les évangiles aux procédés changeants d’une critique arbitraire dont les solutions contradictoires ne laissent rien debout ; en vain on prétend enfermer cette figure surhumaine dans les simples cadres de l’histoire, elle les fait toujours éclater.

On peut expliquer César, (…), le Bouddha, Confucius, on n’explique pas Jésus-Christ. En voulez-vous la preuve ? C’est que les explications qu’on en fait recommencent sans cesse, c’est que vous qui m’écoutez, vous n’êtes pas satisfaits par aucune d’elles,  c’est que chaque époque s’use à ce problème sans le résoudre jamais. «Qu’y a-t-il entre toi et nous, Jésus de Nazareth ? » s’écriait un jour un possédé de Capernaüm. C’est la le cri de la conscience humaine, et chaque génération le répète, emportée tout à tour par l’admiration et par la révolte., allant de l’adoration jusqu’au blasphème devant cette figure dont la perfection l’attire et la repousse, et comprenant, par un infaillible instinct plus fort que tous les sophismes, que Jésus-Christ ne doit plus rien être s’il n’est pas le Maître et le Roi.

 

 

5

 

Nous avons vu, mes frères, quelles sont ce qu’on peut appeler les prétentions de Jésus-Christ. Il nous faut voir maintenant si ces prétentions se sont réalisées ; car que sert de prétendre si l’on ne peut accomplir ? N’est-il pas évident que plus le rêve serait magnifique, plus l’avortement en serait misérable ? Interrogeons donc l’histoire et demandons-lui quel témoignage elle rend à la royauté de Jésus.

Mais, pour obtenir d’elle une réponse sérieuse, il faut bien poser la question. Qu’a réclamé le Christ ? Nous l’avons dit : Une royauté morale et religieuse. Il serait donc absurde, n’est-ce pas ? de chercher si cette royauté s’est exercée dans l’ordre politique ou dans l’ordre purement intellectuel, et de  répéter les vieux sarcasmes des Romains se raillant d’un roi  qui se laisse crucifier, ou les vieilles plaisanteries de Celse sur cette religion d’ignorants qui ramasse ses sectateurs parmi les savetiers, les bateliers et les manœuvres.  Cette royauté, étant de l’ordre moral, ne peut s’exercer qu’en respectant la liberté humaine. Elle ne s’imposera donc ni par la force brutale, ni par des phénomènes visibles qui produiraient sur les sens une pression irrésistible et fatale, ni par une démonstration scientifique qui ne frapperait qu’une faible minorité d’esprits et les subjuguerait par une évidence mathématique, laquelle n’aurait rien de moral. Si l’Eglise, oubliant ce grand principe, voulait réaliser cette royauté par le bras de la chair, ce serait malgré la volonté formelle de son Chef. Il faut par conséquent nous attendre à voir cette royauté tour à tour acceptée ou combattue, acclamée ou maudite. Et c’est bien là en effet ce qu’a manifestement annoncé Jésus-Christ. Souvent il a parlé à ses disciples de l’avenir qui les attendait. Je mets au défi qui que ce soit de trouver dans ces  paroles aucun espérance optimiste, aucune promesse de succès immédiat ou universel. L’impression qui s’en dégage est plutôt sombre, pas plus sombre, hélas ! que celle que produit l’histoire de l’Eglise pendant ces dix-huit siècles. Il y aura de luttes, dit le Maître, il y aura des persécutions et des défections ; il y aura parfois une haine effroyable contre la vérité. Les évènements poursuivront leur cours monotone : guerres et bruits de guerre comme dans tous les temps. Mais le grain de sénevé deviendra un grand arbre, et les peuples chercheront un refuge à son ombre ; mais l’Evangile sera prêché à toutes les nations qui sont sous le ciel.

Deux choses donc clairement annoncées : l’opposition et le progrès, la persécution et la victoire, ou, pour mieux dire, le succès par la défaite même, comme au jour du Calvaire, et cela jusqu’à la fin. Je sais, mes frères, que ce plan divin nous étonne : nous ne pouvons concevoir que le Dieu tout-puissant et tout bon consente à ces longs ajournements, à ces reculs momentanés de sa cause, à ces déroutes apparentes. Si nous étions à sa place, nous ordonnerions sans doute le triomphe immédiat de la justice et la manifestation resplendissante de la vérité. Dieu ne l’a pas voulu.  Il lui a plu que la vérité religieuse fût soumise à toutes les lois qui régissent les choses humaines, et que, dans même qu’au  jour de son incarnation dans l’humanité sainte du Christ, elle a été contredite par les pharisiens et les scribes, reniée par ses propres disciples, raillée par Hérode et Pilate, livrée aux soufflets et aux crachats du prétoire, de même, de même dans son incarnation déjà dix-huit fois séculaire au sein de notre humanité corrompue, elle fût confiée à des vases d’argile, transmise par des hommes à des hommes, traduite imparfaitement dans leurs langues imparfaites, travestie, calomniée, souvent persécutée, rendue solidaire des infirmités des disciples, compromise par leurs erreurs, servie par leur dévouement, par leur science ou leur énergie, propagée par leurs découvertes, par l’imprimerie, par la vapeur, par la diffusion des lumières et des libertés ;puis tout à coup arrêtée, pour longtemps peut-être, par quelque accident vulgaire, par des causes fatales en apparence qui lui raviront ses plus vaillants apôtres et la laisseront sans défense. Telle m’apparaît dans l’histoire la royauté de Jésus-Christ, divine dans son origine, humaine dans ses destinées, soumise à toutes les vicissitudes des chose d’ici-bas, et marchant à travers ses défaites momentanées ves son triomphe assuré.

Ne vous demandez donc pas si la cause du Christ est une cause toujours populaire et toujours victorieuse. D’avance, et l’Evangile à la main, nous vous dirions que cela est impossible. Mais demandez-nous si sa royauté spirituelle est réelle, et, pour répondre à cette question, nous en appellerons d’abord  à ceux qui l’acceptent, ensuite à ceux qui la repoussent, soit qu’ils la détestent, soit qu'ils la méconnaissent.

Ecoutez d’abord ceux qui l’acceptent. « Il est Roi ! » Voilà le cantique que chante sous tous les cieux l’Eglise chrétienne, et que répètent avec elle tous ceux qui se sont inclinés sous le joug pacifique et doux de Jésus-Christ. En ce jour, à cette heure, nous pourrions l’entendre sur les lèvres de millions d’adorateurs de tout âge et de toute nation ; les uns le disent dans l’élan naïf de leur jeune enthousiasme, comme ces myriades d’enfants que chaque génération amène aux pieds de Celui qui a dit : « Laissez-les venir à moi » : les autres avec l’affirmation ferme d’une conviction puissante et raisonnée ; les autres avec le cri de repentir du pêcheur qui revient de ses égarements passés ; les autres dans les larmes d’une douleur immense qu’à éclairée l’apparition du Consolateur souverain. Cette royauté, ce sont les fils de Sem qui les premiers l’ont saluée, mais la Grèce en a senti la beauté morale, et Rome en a subi l’ascendant, et quand les races fières et sauvages sont sorties des forêts de Germanie et des steppes de l’antique Orient, elles se sont courbées devant le Crucifié, comme ces Goths à la fauve chevelure, ancêtres des races anglo-saxonnes, que Chrysostome voyait adorer le Christ dans une basilique de Constantinople, et dont il disait, par un prophétique instinct, qu’ils porteraient un jour le flambeau de l’Evangile que les Grecs laissaient tomber de leurs mains indignes…

Ainsi, de siècle en siècle, le christianisme étend ses limites. Aujourd'hui, il n’est pas un croyant qui, regardant sur la carte du monde cette Afrique, terre longtemps maudite, et dont le sable a bu le sang humain par torrents, ou ces vieux empires de la Chine et des Indes,  ne dise : « Un jour, ces peuples seront conquis à Jésus-Christ. » Or, chez tant de races si dissemblables d’aspect, de langue, de tempérament, de génie, Jésus-Christ a su se créer un empire fondé sur ce qu’il y a dans l’homme de plus intime et de plus profond, comme l’attesteraient, s’il le fallait, beaucoup de ceux qui m’écoutent et qui rattachent à son nom les plus grandes émotions de leur vie intérieure et les décisions qui souvent les ont sauvés. Quel empire peut être comparé à celui-là ? Comme le flux qui à chaque marée soulève l’Océan s tous les rivages du monde, ainsi l’adoration apporte aux pieds du Christ l’hommage des cœurs dont il les Maître, et ceux-là même que ce courant n’entraîne pas doivent laisser échapper cet aveu que nul, parmi les enfants des hommes, n’est aimé comme lui.

On nous dire, je m’y attends, que dans ce concert il y a des voix discordantes et que cette royauté a été, dès le premier jour, combattue avec acharnement. Je ne l’oublie point, et, il y a un instant, je rappelais que le Christ l’avait annoncé. Toutefois, prenez-y garde,  la vérité peut se reconnaître à deux signes :  à l’amour qu’elle inspire, et à la haine qu’elle soulève ; il y a des malédictions qui sont pour elle un hommage plus magnifique que l’adoration même. Quand toutes les voluptés, toutes les infamies, toutes les cruautés de la Rome antique, ameutées contre l’Eglise naissante debout dans sa robe virginale, faisaient monter vers elle leurs rugissement et leurs colères, ces voix disaient à leur manière, aussi bien que les chrétiens dans leurs cantiques, que le Christ est un roi d’amour, de justice et de sainteté ! Est-ce que vous auriez voulu que Néron saluât le Christ autrement que par la haine, et que, comme tant d’autres Césars de son espèce, il mêlât à ses impudicités et

à ses massacres l’invocation du Dieu saint ? N’est-ce pas assez déjà, n’est-ce pas trop pour l’Eglise d’avoir eu pour protecteur un Constantin en attendant les Charles IX et les Philippe II ?

Vous me répondrez, je le sais, et je l’aurais dit même, que la question ne se pose plus ainsi de nos jours, et qu’il y aurait une iniquité véritable à ranger tous les hommes qui se détournent aujourd'hui de Jésus-Christ parmi ceux qui suivent les inspirations de leur orgueil ou de leur cœur corrompu. Vous me montrerez des hommes, des esprits éminents qui ont rompu ouvertement avec le christianisme, et qui cherchent sincèrement dans les inspirations de leur conscience la règle de leur conduite et la direction de leur vie. Mes frères, je reconnais ces faits, bien décidé que je suis d’avance à ne jamais appeler mal ce qui est bien, et à saluer l’intégrité de la vie où que je la rencontre ; soit, ce que j’ai vu souvent, qu’elle s’allie à des idées superstitieuses que je condamne, soit qu’elle s’unisse à des négations qui me consolent.

Oui, il n’est que trop vrai que, sous le drapeau de Jésus-Christ, marchent des hommes dont la vie est pour l’Eglise un sujet d’humiliation et de scandale, et que parmi ceux qui le combattent nous rencontrons des adversaires auxquels nous ne pouvons pas refuser notre respect. Il y a dix-huit siècles que le Maître a prédit que l’ivraie se mêlerait au bon grain dans le champ qu’il est venu ensemencer, et que ce n’est pas à ses disciples qu’il appartiendrait de les séparer. Ce fait m’attriste, il n’ébranle pas ma foi, et je vous dirai très sincèrement pourquoi.

La soumission à Jésus-Christ implique deux choses : la foi en sa personne, l’obéissance à sa volonté. Ces deux éléments réunis forment la vie chrétienne ; plus  leur union est étroite, plus cette vie est intense. Mais l’histoire nous montre que cette union est rare. Il y a des époques, de longues époques où la conservation de la foi, de l’unité de la foi, de son orthodoxie, a été l’idée dominante et souvent exclusive de l’Eglise, où la vie chrétienne a presque tari, et où la foi elle-même, séparée de la vie, est devenue de plus en plus extérieure, intellectuelle et desséchée. Rappelez-vous Byzance, où les discussions aussi subtiles qu’acharnées sur l’essence divine se mêlent aux plaisirs raffinés d’une cour corrompue ; rappelez-vous l’époque des Mérovingiens, où les assassinats et les empoisonnements se multiplient pendant que sur les basiliques on lit ces mots triomphants : Christus vincit, Christus Regnat, Christus imperat. Rappelez-vous l’Italie au XVe siècle, la cour des Valois au XVIe et la vieillesse de Louis XIV. L’édifice extérieur est debout, imposant, majestueux, mais la pourriture morale en ronge sourdement les bases jusqu’à l’heure où il s’écroule avec un bruit de tempête.

Fatalement ces excès en appellent d’autres ; sans cela l’humanité ne serait pas l’humanité. Quand l’heure de l’émancipation sonne, on méprise, on maudit cet enseignement, ces dogmes au nom desquels tant d’iniquités se sont commises. Et, pour mieux les réfuter, que fait-on ? On leur oppose des principes de justice, d’équité, d’amour, de miséricorde, en n’oubliant qu’une chose, c’est que ces principes sont le fond même de l’Evangile et relèvent directement de Jésus-Christ. Oui, c’est Jésus-Christ que l’on oppose à Jésus-Christ. Les uns agissent ainsi avec la perspicacité d’ennemis qui choisissent habilement leurs armes : ainsi Voltaire, dont on a pu dire avec vérité qu’en secouant l’arbre desséché du christianisme, il en a fait tomber des fruits que les croyants avaient oublié de cueillir. D’autres ignorent le Christ, ils ne l’ont jamais entrevu qu’à travers l’ombre épaisse de l’ignorance ou d’invincibles préventions ; mais en combattant contre lui, ils subissent, sans qu’ils le sachent, l’ascendant de son esprit et de ses préceptes, et tandis que les chrétiens de nom donnent Jésus-Christ leur foi sans lui donner leur vie, ces incrédules de nom le servent dans leur vie, tout en lui refusant leur foi. « Christ est-il divisé ? » dit saint Paul. Hélas ! l’histoire nous montre que trop cette division cruelle : d’un côté, ceux qui croient sans agir ; de l’autre, ceux qui agissent sans croire. Et, quand nous  songeons à ces derniers, comment ne pas nous rappeler la scène sublime de la parabole du jugement dernier ? « Alors les justes diront : Seigneur, quand t’avons-nous vu avoir faim ? quand t’avons-nous vu étranger, malade et en prison, et sommes-nous allés vers toi ? Et le Roi leur dira : Je vous dis, en vérité, que toutes les fois que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits d’entre mes frères, c’est à moi que les avez faites ». (Matthieu 25, 37 – 40). Qui dira, mes frères, qui pourra dire quel est aujourd'hui dans le monde le nombre de ces serviteurs inconscients du Christ inconnu ?

Ainsi donc, partout dans ce siècle tourmenté, je retrouve l’influence de Jésus-Christ. Oh !  je sais que sur l’Eglise viennent fondre de toutes parts des souffles de tempête. Les uns descendent des hauteurs glacées d’une science incrédule, les autres montent des bas-fonds où s’agitent des multitudes exaspérées par des souffrances séculaires : ce sont des cris de colère, de haine et de blasphème, et je me rappelle, en les entendant, la douce parole du Maître : « Quiconque aura blasphémé contre le Fils de l’homme, il lui sera pardonné », et cette prière, expression suprême de la clémence infinie : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font ».

Mais quand, épouvantés par ces clameurs qui passent, des croyants viennent nous dire que le règne du Christ va finir, je sui tenté de leur répondre : »O hommes de peu de foi, ne pleurez pas sur le Christ, car il demeure, mais pleurez sur vous-mêmes et sur cette race aveugle qui méconnait Celui qui pourrait la sauver. »

Non ! son règne ne finit pas, et dans ce crépuscule qui, selon vous, va s’éteindre, nous saluons, nous, l’aurore d’un jour dont l’Eglise renouvelée verra la splendeur. En voulez-vous la preuve ? Interrogez ces hommes dont les menaces vous effraient, demandez-leur quel est leur programme d’avenir, et vous verrez que ce qu’il contient de plus généreux et de plus pratique n’est qu’un plagiat de cet Evangile dont la réalisation pratique, bien loin d’être achevée, a, il faut le dire pour l’humiliation des chrétiens, seulement commencé.

Que demandent-ils ? La liberté ? Ecoutez l’Evangile : « Les rois des nations les maîtrisent, et ceux qui ont autorité sur elles sont appelés bienfaiteurs. Il n’en doit pas être ainsi parmi vous. » La justice ? Ecoutez l’Evangile : « Heureux ceux qui ont faim et soif de justice, car ils seront rassasiés ». L’égalité ? Ecoutez l’Evangile : « Vous êtes tous frères. » L’indépendance de la conscience religieuse ? Ecoutez l’Evangile : « N’appelez personne sur la terre votre père, car nous n’avez qu’un Père, celui qui est dans les cieux. » L’affranchissement de la société civile de toute domination spirituelle ? Ecoutez l’Evangile : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ». La destruction de tous les esclavages, la protection des mineurs et des faibles, la participation plus large de tous  à tous les droits, la destruction de la misère et de l’ignorance, la réalisation pratique de la grande loi de la solidarité ? Mais l’Evangile peut-il leur être hostile, quand c’est lui, le premier, qui les a proclamés ? Que demandent-ils encore ? La fin des haines nationales et des guerres, le règne de la paix ? Mais où ce règne a-t-il été dépeint d’une manière plus magnifique que dans ce livre qui, sous Tibère et sous Néron, affirmait que l’héritage et la possession de la terre seraient à ceux qui cherchent et qui veulent la paix ? Ne dites donc pas que vous avez dépassé  l’Evangile, quand il se dresse devant vous comme le phare resplendissant de l’avenir. Dites-nous, à nous, chrétiens, que nous l’avons parfois misérablement travesti. Nous courberons la tête, parce que cela est vrai ; mais la honte, du moins, n’en sera pas à Celui qu enseignement appelons notre Roi.

Ah ! je sais que dans cet Evangile il y a autre chose : il y a ces vérités religieuses dont vous croyez que l’homme peut se passer désormais ; il y a l’affirmation d’un Dieu créateur, législateur et juge ; il y a la proclamation de notre responsabilité morale, de notre culpabilité et de la nécessité pour nous du repentir et de la foi ; il y a la divine promesse d’un pardon qui est une grâce ; il y a l’assurance de l’amour profond, infini, de Celui que nous appelons  notre Père ; il y a la certitude de son incessante action dans l’histoire de ce monde et dans la plus humble de nos destinées ; il y a la vie éternelle enfin avec tout ce qui ce mot renferme de consolation pour des cœurs tels que les nôtres, dont la félicité terrestre est à la merci d’une épreuve, et qui devront, demain peut-être, placer leur trésor le plus cher sous les planches de chêne ou de sapin d’un cercueil. Ces vérités religieuses que nous appelons des doctrines, le christianisme les a étroitement unies aux vérités morales que l’on prétend en séparer aujourd'hui. Dans sa profonde connaissance de l’humanité, il a vu que celles-ci découlaient de celles-là. C’est qu’en effet vouloir supprimer la religion pour mieux conserver la vie morale, c’est vouloir niveler les Alpes gigantesques et prétendre s’abreuver encore aux profondes qui en découlent, comme si ce n’était pas des glaciers accumulés à leurs cimes que descendent le Rhône et  le Rhin.

Eh bien ! il reste à savoir si l’on pourra niveler les doctrines religieuses qui sont Alpes de l’âme humaine, si l’on parviendra à éteindre la grande lumière que l’Evangile a projetée sur nos destinées, et si la génération qui nous suit devra inscrire sur la porte d’entrée du XXe xc ces mots par lesquels saint Paul résumait l’état du monde païen de son temps : « Sans Dieu, sans espérance. » Nul ne peut dire où nous fera descendre l’ivresse d’athéisme qui trouble aujourd'hui tant d’esprits, mais, pour son honneur même, j’affirme que l’humanité ne s’arrêtera pas dans ces bas-fonds ; et lorsqu’elle voudra monter vers la lumière, il lui faudra saisir,  non pas la main tremblante d’un simple enfant des hommes, mais la main puissante de Celui qui seul a résolu  les mystères du péché, de la douleur et de la mort, et qui lui dit depuis dix-huit siècles : « Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient à Dieu que par moi. »

Pour nous, chrétiens, qui avons trouvé dans le Christ le Roi de nos âmes, serrons-nous plus résolument que jamais autour de son drapeau, et, puisque Dieu nous appelle à le servir dans la liberté religieuse si vaillamment revendiquée par nos pères, puisque dans l’ordre de la révélation religieuse, comme dans l’ordre de la grâce, comme dans l’ordre de l’Eglise, nous n’avons qu’un seul Maître,   le Christ, jurons de lui rester fidèles jusqu’à l’heure de la mort, qui, grâce à lui, sonnera pour nous l’entrée dans la vie éternelle.

 

Mes frères, il y a trois siècles, l’homme qui devait être le plus grand héros de la Réforme française, Gaspard de Coligny, défendait contre la formidable invasion des Espagnols la petite ville de Saint-Quentin. L’imprévoyance des Valois avait livré aux étrangers les frontières de la France ; Philippe II se dirigeait sur Paris, sans cette poignée de braves qui l’arrêta dans sa marche, Saint-Quentin n’avait que des remparts en ruines ; la fièvre et la faim décimaient ses défenseurs, la population, effrayée, parlait de se rendre ; la trahison se glissait partout dans l’ombre. Un jour, les ennemis jetèrent par-dessus les murailles de la ville des flèches portant des bandelettes sur lesquelles était une inscription qui promettait aux habitants, s’ils voulaient se rendre, de leur accorder la vie sauve, et de leur laisser leurs biens. Pour toute réponse nous raconte un officier espagnol , Coligny prit une bande de parchemin, il y écrivit ces simples mots : Regem habemus ; puis, il la fixa sur un javelot qu’il lança dans le camp des ennemis. Regem habemus. Nous avons un roi ! C’était pour  lui l’expression héroïque de ssa foi en sa patrie, que son âme loyale incarnait dans son roi, et cependant ce roi était Henri II, l’époux de Catherine de Médicis, le père de ce Charles IX qui doit devenir l’assassin du grand capitaine huguenot.

Et nous, chrétiens, enfermés dans cette vieille citadelle de l’Eglise, aujourd'hui de toutes parts attaquée, debout sur des remparts qui souvent s’écroulent, au milieu de tant de lâches conseils et de rumeurs sinistres qui nous annoncent une défaite prochaine, nous dirons à notre tour :Regem habemus. Nous avons un Roi ! le Roi de justice et de vérité, qui doit vaincre le monde et auquel appartiennent l’Empire et la gloire à jamais ! Amen !

 

« Jean n’a fait aucun miracle » (Jean 10, 41)

 

Lettre au journal italien La Lega, en date du 1ernovembre 1881

 

Le positivisme, on le sait, ne veut pas être confondu avec le matérialisme. Qu'il me soit permis de remarquer qu’en fait ses conclusions sont identiques. M. Littré le reconnait implicitement lorsqu’il écrit ceci : « Le monde est constitué par la matière et par les forces de la matière… ; au-delà de ces deux termes, matière et force, la science positive ne connait rien ». (Préface des Œuvres d’Auguste Comte, p.IX).

Récit du siège de Saint-Quentin, par un officier espagnol ap. Ch. Gomart, p. 301

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21 septembre 2013 6 21 /09 /septembre /2013 16:21

Cher(e)s ami(e)s

D’accord, vous me l’avez demandé, je vous raconte « le thon » pour commencer. Donc, il était une fois, un thon… un bon gros thon, ni plus bête, ni plus mouillé que ses congénères « thon ». Et il fit une découverte qui valait son pesant de poisson mangeables, pas en or. Chez les thons, l’important c’est de pouvoir manger ; et l’or, c’est bien connu, même quand il est fondu, c’est incomestible. Bien que, un petit lingot d’or dans mon armoire…

 

Bref, il s’aperçut, le thon, pas le lingot, qu’il y avait du côté de Port  la Nouvelle un conjoncture fort intéressante et plus qu’appétissante (ah bon, il faut deux « p » ; si le correcteur le dit...) : un grand étang avec des dorades (daurades), des loups (bars), des mulets (lices), des saurels (chinchards), des tas et des tas et des tas de petites choses dont le nom importe peu et qui, seuls ou en bandes, naviguaient en allées et venues, en empruntant le canal qui traverse la ville jusqu’à la mer toute proche. Un réservoir de nourriture à thon !  Au bout du canal, une jetée à gauche (balisant la « vieille nouvelle », une grande plage qui rejoint Gruissan, lieu parfois fréquenté par… je ne veux pas être mauvaise langue, je laisse donc les points de suspension) ; et une jetée à droite, la fameuse « promenade » où se retrouvent tant qu’il fait bon tous les humains avides de grand air, de soleil, de vent, et de « parlottes » avec les autres humains venus pour les mêmes raisons… un genre de promenoir déambulatoire à conversations croisées, défouloir des stress et autres encombrements cérébraux de nos semblables.

 

Au bout de chaque jetée, un phare. Et là, juste devant les phares, ou parfois même entre les phares, le thon parade, déambule, saute et fait d’énôôôrmes splach( « s » ou « es », c’est comme vous voulez).

 

Sur la jetée, avec un troisième œil, pas entre les deux normaux, mais dans les mains, les humains tentent, vainement, de graver, en numérique, l’instant magique du saut de l’animal… je n’ai pas encore vu de photos ! il est malin, le bougre. Peut-être être qu’il est déjà fiché quelque part et qu’il ne veut pas qu’on le reconnaisse ?

 

Bref, le thon se promène, depuis plusieurs mois, un jour ici, un jour là, un jour avec, un jour sans… et ce sont les pauvres pêcheurs du bord de mer qui sont les plus marris (tiens, deux « r »… ) car le gaillard qui doit peser entre 70 et 80 kilos leur pique sous le nez le bar ou la daurade dont ils auraient bien fait leur « gaudeamus » (ah ! ah ! encore le dico des synonymes de Caen !!!). Mais que nenni, premier arrivé, premier servi.

 

Que voulez-vous, ce pourrait être la morale de l’histoire : « c’est dans l’eau qu’il faut être quand on veut faire le thon »…

 

Voilà, l’histoire du thon que vous m’avez demandée.

 

Quant aux promenades sur la toile, j’ai passé la semaine à courir après « Calvin » pour préparer les cours que la fac de Genève offre en vidéo et en direct pendant 5 fins de semaines dès le mois d’octobre. Ne dites pas non ; allez d’abord voir le site  d’information : http://mooc.fr/blog/calvin-histoire-et-reception-dune-reforme/.

 

Du coup, sur mon blog, des infos complémentaires au fur et à mesure de mes découvertes. Si le cœur vous en dit : http://lecoeuretlamain.over-blog.com .

 

Bien sûr, il y a le site Jean Calvin.org avec des tas et des tas de référencements : http://www.jean-calvin.org/ (attention : ne pas confondre avec le site de la librairie Jean Calvin qui n’a rien à voir).

 

Chère Jany, tu as tant insisté pour que j’emporte l’histoire de Calvin en 4 volumes monstrueusement énormes de E. Doumergue. Je sais maintenant que tu avais raison. On aurait dit 4 mammouths pesant chacun des tonnes… et pourtant, malgré le poids, l’écriture coule comme l’eau claire de la rivière, les documents d’archives sont abondants et très lisibles, et évidemment, le principal, on plonge dans un monument d’infos sur l’époque, les gens et Calvin qui a baigné dedans. Si vous le trouvez en bibliothèque et que vous aimez l’histoire, foncez.

 

Demain à Narbonne (10 h 30) et Perpignan (11 h) rien de spécial sauf si un culte où l’on est invité vous semble un évènement d’importance. 

 

Et Lui, qui ne piaffe même pas quand je raconte des histoires de thon, attend avec patience que je finisse mes calembredaines et autres coquecigrues (pardon, Seigneur, mais le dico de Caen…….) et que je me tourne vers Lui, avec vous, pour rendre grâce et louer. Nous voilà, Seigneur, merci…

 

Amitiés

 

Jo

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20 septembre 2013 5 20 /09 /septembre /2013 13:31

peut-être disposerez-vous des 5 week-end offerts pour suivre les cours inédits sur Calvin : "histoire et réception d'une réforme" ?

 

Cours diffusés sur la plateforme "coursera", cours MOOC (vous ne savez pas ce que c'est ?)... vous pouvez aller jeter un oeil sur le site de la fac : http://www.unige.ch/theologie/actualites/mooc.html

 

pour les amateurs je prends un peu de temps pour trouver de la doc, par exemple des vidéos, des conférences, des reportages audios dont une grande partie sont déjà référencés sur : http://www.jean-calvin.org/

 

quant à moi, j'ai l'immense privilège de disposer de l'oeuvre monumentale de E. Doumergue "Jean Calvin";  en 4 volumes. un truc de ouf ! j'ai commencé à y mettre le nez, un peu tous les jours.

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20 septembre 2013 5 20 /09 /septembre /2013 13:26

Luc 13, 25 : Je ne sais d’où vous êtes.

 

Ce n’est pas à moi que cette parole s’adresse : je l’entends, l’inexorable sentence, avec frayeur pour les autres, sans frayeur pour moi.

Mais n’y a-t-il pas eu un temps où elle m’était applicable ? Sans doute ; mais, même dans ce temps-là, je n’étais pas un étranger pour Jésus-Christ. Il était à ma recherche. Le mal que je faisais me laissait d’amères tristesses ; je n’en prenais pas mon parti. Je n’avais encore rien compris à la bonne nouvelle. Comme il fallait que je fusse aveugle pour ne pas voir que Dieu me prévenait ! Il y avait même à cette époque de ma vie quelque chose de Lui en moi. Et Aujourd’hui ?

Aujourd’hui la mesure est comble. Il a remporté la victoire. Il a chassé l’ennemi. Il a fait plus que de le chasser : il l’a tué. C’est son influence qui a prévalu. Il a soutenu la lutte contre moi, - et quelle lutte acharnée, et comme je me dérobais, me laissant reprendre le lendemain par sa main fidèle pour m’enfuir encore loin de lui, ramené de nouveau par la misère du péché, par la souffrance d’être éloigné de Lui ! Aujourd’hui il m’a repris ; je ne me débats plus, je ne cherche plus à me tenir à distance. Nous ne sommes plus deux, nous sommes un. Il sait que je suis à Lui. Je sais qu’Il est à moi. Vivre dans son intimité, c’est la vie idéale ; y mourir, c’est mon souhait et ma certaine présence.

 

Jean 3, 8 ( ?) : Jésus-Christ destructeur du mal. Le fils de Dieu a été manisfesté pour détruire les œuvres du Diable.

 

Quelle œuvre progressive que la sienne, œuvre de patience autant que d’amour !

Il apparaît, attirant nos regards par l’éclatant témoignage qu’il y a dans son apparition même, de l’amour de Dieu pour un monde plongé dans le mal.

Une vie sans tache se termine par un dévouement sans borne. L’innocent se substitue au coupable. L’expiation des péchés est accomplie.

C’est l’œuvre de la croix, l’œuvre extérieure ; mais ce n’en est que la moitié.

Le Saint-Esprit me convainc de péché.

Il me montre sur la croix Celui qui l’a expié !

Je regarde à Lui avec confiance parce qu’Il me regarde avec compassion.

Je reçois le pardon du mal que j’ai fait.

Mais il s’agit de le détruire dans mon cœur.

Je commence par le haïr à cause du trouble qu’il jette dans ma vie et de la barrière qu’il a mise entre Dieu et moi.

Je le crains, parce que, pour me soustraire aux conséquences désastreuses de son empire, il n’a fallu rien moins que le sacrifice sanglant du Fils de Dieu.

Je commence à le haïr parce que je commence à aimer Dieu.

Le Seigneur me donne le Saint-Esprit pour qu’il demeure éternellement avec moi.

Sous son influence les habitudes du mal sont attaquées à leur racine, le cœur est changé, la vie est transformée.

Et puis, à la suite de ces alternatives de victoires et de défaites, un jour arrive où, par mon union avec le Seigneur, je deviens un même esprit avec Lui.

C’en est fait. Le mal n’a plus en moi un complice. J’ai passé tout entier du côté de dieu, nos intérêts sont les mêmes, nos vues sont identiques. L’épreuve de la lutte n’est plus douteuse et je chante au fond de mon cœur : Gloire à dieu, qui nous a donné la victoire par notre Seigneur Jésus-Christ !

 

1 Jean 2, 28 : Petits enfants, demeurez en Lui, afin que, quand Il paraîtra, nous ayons de la confiance, et que nous ne soyons pas confus devant Lui à son avènement.

Quelle confusion pour ceux qui, n’ayant jamais été en communion avec Lui, le verront soudain face à face ! Ils s’étaient fait illusion ; ils avaient cru qu’un nom bien respectable, une croyance bien coordonnées, une vie exempte de grands péchés les couvriraient suffisamment. A l’heure de la redoutable rencontre tout s’évanoui ; le nom ne compte pour rien ; une foi dont l’amour est absent est moins que rien et leur vie leur apparaît dans son effrayant égoïsme, tout entière soustraite à l’influence de Jésus.

Il n’y a qu’une voie à prendre pour faire de cette rencontre la plus grande joie de sa vie. C’est de s’unir à Lui et de demeurer en Lui. Demeurer en Lui ! Quel trait de lumière ! Tout le reste : la paix, la force, la joie, et toutes les autres grâces qui ornent l’existence et la transfigurent ne sont que les conséquences de ce contact avec Lui, les branches du cep divin. Demeurer en Lui ! On ne comprend jamais ce qu’une telle expression signifie que lorsque l’union avec Lui est consommée.

 

 

Nombres 21, 4 : Le peuple perdit courage par le chemin.

 

On ne s’attend pas à ce trait : Il perdit courage. Ne vient-il pas de remporter une éclatante victoire accordée à ses prières ? il doit éclater en actions de grâces ! Oui, une heure après ou le même soir. Mais le lendemain . Qui se rappelle la délivrance de la veille ? Qu’on ait mal dormi, fait une mauvaise digestion ou un mauvais rêve, qu’il y ait de la brume au lieu du ciel bleu qu’on attendait, on se décourage, on reste accablé. C’est le moment des regrets et des récriminations : le passé valait bien mieux, la vie était plus facile ; qui nous rendra les bons moments d’autrefois ? Toujours marcher, toujours lutter ; on n’en finit jamais.

Ingrat ! que serais-tu sans l’intervention de ton Dieu ? Un esclave. Que ferais-tu ? Tu épuiserais tes forces à faire des briques sous le bâton de tes maîtres. Tu avais du pain, c’est vrai ; mais c’était le pain de la servitude. Aujourd’hui tu es libre, tu as devant toi l’espace illimité, ou plutôt ton regard s’arrête sur une vision magnifique. Derrière cet horizon, à quelques pas, se trouve une terre merveilleuse découlant de lait et de miel. C’est de ce côté que tu marches. Il n’y a pas d’endroit que tu aies traversé qui ne soit marqué par quelque délivrance ou quelque victoire. Voici la mer Rouge. Il n’y a pas si longtemps que tu l’as passée à pied sec. Le pain que tu manges est un pain miraculeux. Il ne sort pas du sol comme celui de l’Egypte ; il tombe du ciel. Tu t’en es fatigué ; l’Eternel, qui l’ préparé pour entretenir ta vie, t’a montré qu’il ne lui était pas difficile de te donner autre chose. Tu as soupiré après une chair savoureuse. Tu as été exaucé à souhait : le lendemain, à ton réveil, tu as vu autour du camp, à la portée de ta main, une couche épaisse d’oiseaux à la chair délicate. Ce n’est que d’hier que le rocher aride s’est fendu et a laissé couler une source pour te désaltérer. Tu as rencontré des ennemis ; ils n’ont pu tenir devant toi. Le bruit de tes victoires fait trembler les peuples de Canaan dans leurs villes fortifiées. Encore quelques plaines de sable aride à traverser, encore quelques luttes, encore quelques jours d’attente et tu entreras triomphant dans la terre promise. Tu peux dire déjà ce qu’un de tes descendants chantera un jour dans la joie de son cœur : tu m’as pris par la main droite, tu me conduiras par ton conseil, et puis tu m’introduiras dans la gloire !  Courage donc ! retire tes paroles offensantes à l’endroit de ton libérateur ; rougis de tes doutes ; chasse ta tristesse ; relève-toi et marche, heureux privilégié, la joie au cœur et le front serein. Voici de nouvelles luttes ; mais autant de luttes, autant de victoires. « Vous aurez des tribulations dans le monde ! mais ayez bon courage ! J’ai vaincu le monde ! »

 

Habacuc 3, 17-18 : le figuier ne poussera point et il n’y aura point de fruit dans les vignes ; ce que l’olivier produit mentira et aucun champ ne produira rien à manger. Les brebis seront retranchées du parc et il n’y aura point de bœufs dans les étables ; mais moi, je me réjouirai en l’Eternel et je m’égaierai au Dieu de ma délivrance.

 

Voilà, à la fin et à certaines heures de la vie, la différence qui existe entre l’enfant de Dieu et le reste du monde.

La prospérité extérieure tarira, les espérances sur lesquelles on comptait mentiront comme l’olivier qui se couvre de fleurs et qui ne garde point de fruit ; il n’y aura plus rien dans la caisse, plus de dividendes, plus de revenus, pas trace de provision dans le garde-manger. Mais, au milieu de cette disette, il y aura des cœurs où chantera la joie. Cette joie vient-elle de ce que ceux-ci nagent dans l’abondance, tandis que ceux-là sont dans la disette ? Non. Les uns souffrent comme les autres : les malheurs publics les atteignent, leur avoir est compromis, leurs revenus sont réduits à rien. Il y a de quoi se lamenter pour le jour présent et trembler pour le lendemain.

Si on prête l’oreille, on entend un concert de plaintes et de gémissements ; mais il semble qu’il y a aussi des cris de joie.

Tous appauvris, tous misérables, quels motifs de se réjouir peut-on avoir ? La joie ne vient pas de ce que Dieu ôte, mais de ce qu’il donne. Il appauvrit d’un côté : sous ce rapport tous sont égaux. Il enrichit de l’autre. C’est ici que l’égalité cesse : il y a des indigents et des millionnaires. Les millionnaires montrent bien quelle est la nature de leur richesse dans les paroles de l’un d’entre eux : il se réjouit, dit-il. Est-ce de l’abondance de ses récoltes, de la multiplication de ses bêtes à cornes ou à laine ; est-ce à cause d’une spéculation heureuse, d’un héritage tombé du ciel, du recouvrement d’une somme qu’il croyait à jamais perdue ? Non. Il dit expressément : je me réjouirai en l’Eternel. Et plus loin, il précise d’une manière particulière le sujet de sa joie : c’est une délivrance. De quoi est-il délivré ? de deux fardeaux insupportables : du châtiment justement mérité et du mal dont il était esclave. Mais il se réjouit d’un autre bienfait. Dieu ne fait pas les choses à moitié. Quand il a brisé les chaînes d’un homme, il ne le laisse pas à la merci de ses ennemis qui pourraient à l’occasion remettre la main sur lui. Il se l’attache, il l’admet à sa table, dans son intimité. Il partage tout avec lui. Il met à sa disposition sa force pour résister au mal. Il lui communique quelque chose de sa vie divine. Il l’unit à lui d’une manière si étroite qu’ils ne sont plus qu’un même esprit.

 

Jean 12, 28 : Père, glorifie gon Nom.

 

En moi, par moi. Que le don merveilleux que tu m’as fait d’être un même esprit avec Toi ne soit pas pour moi seulement, mais aussi pour les autres. Je suis si différent à l’intérieur de ce que j’étais il y a quelques semaines ; et au dehors il semble que rien ou presque rien n’est changé. Je ne sais quels liens me retiennent encore, quelle couche terreuse il y a autour du diamant qui n’est diamant que parce qu’il est ton œuvre, uniquement ton oeuvre. Ma vie extérieure et mon influence doivent correspondre exactement à la grâce admirable que tu m’as accordée. Je suis impatient de porter avec abondance les fruits de cette nouvelle nature. Et d’autres fois il me semble que je dois attendre mon heure, que je dois me contenter d’un développement continu, que, tout en me créant pour cette merveilleuse conformité, tu veux que j’en conquière chaque trait nouveau par une victoire sur mes vieilles habitudes, comme si j’étais moi-même l’auteur de cette merveille dont tu es le créateur. Mais, Seigneur, tout en attendant avec patience le développement que chaque jour doit amener, j’ai hâte de rentrer dans la vie active pour faire valoir ce don inappréciable. Je le souhaite et en même temps je me renferme avec délices dans ma communion avec toi ; je n’ai plus de goût à écrire quoi que ce soit qui y serait étranger. J’aime à me faire une solitude où je te retrouve, où ton image m’apparaît dans tout son éclat. Je tire avec délices les conséquences innombrables de la conformité que tu as créée entre ton Esprit et le mien. Je m’y enfonce avec tant d’oubli de tout le reste que j’en suis quelquefois effrayé, et qu’à cause du caractère purement contemplatif de ma foi, je douterais, s’il pouvait y avoir une ombre de doute, que tu aies fait une œuvre si grande dans le cœur de ton enfant.

Père, glorifie ton Nom !

Je le glorifie dans le silence de la nuit. Les étoiles brillent au ciel ; un vent qui a passé dans le feuillage et qui le fait murmurer me caresse le visage. Tout cela est ton oeuvre. Mais l’œuvre intérieure est bien autrement admirable. Je te bénis de l’avoir faite dans un cœur si mauvais que le mien ; tu n’as pas choisi la meilleure pierre de la carrière pour la tailler à ton image. Ton amour moi est incompréhensible : moi, le dernier des hommes, qui ai tant et tant à me reprocher, tu m’élèves du fumier non pas jusqu’aux cieux, - ce ne serait rien -, mais jusqu’à Toi. Père glorifie ton Nom !

Ton Nom !  Que, demain, le reflet de ta personne éclate dans mes paroles, dans mon action, dans mon attitude. Corrige tout ce que tu as à corriger !  Ah ! quelle œuvre difficile, devant laquelle pourtant ta charité ne recule point ! Mon dieu, les jours sont si courts, je suis déjà si avancé en âge ! Le nombre des occasions où je puis annoncer ton bras à cette génération est compté. Hâte-toi ! mûris-moi ! Fais le dehors à l’image du dedans, et que je sois, au milieu des hommes et la parole à la bouche, ce que je suis dans le secret avec Toi : un même esprit. Autrefois, des succès, un nombreux auditoire m’auraient tourné la tête. Tu m’as miséricordieusement refusé tout cela. Aujourd’hui, je sens que je ne sépare pas ma cause de la tienne et que succès et bénédictions m’humilieraient au lieu de m’élever, et que je t’en rapporterais toute la gloire.

Façonne-moi pour ton oeuvre. La matière est rebelle ; rien ne peut venir de moi que lâcheté, couardise, enflure, sotte vanité. Tout cela, c’était moi ; mais ce n’est plus moi du moment que tu es venu t’unir à moi et faire de ce pauvre pécheur, de ce douteur, de ce misérable, un même esprit avec Toi.

 

2 Corinthiens 10, 3 : Quoique nous vivions dans la chair, nous ne combattons point selon la chair.

 

La vie de saint Paul n’est pas différente de celle des autres hommes : il est soumis aux mêmes infirmités ; il est assujetti aux mêmes lois ; il se fatigue ; il pleure ; il est tenté. Mais il ne prend pas ses armes là où il trouve ses afflictions et ses périls. Il pourrait être tenté d’employer des moyens, des expédients humains pour repousser des attaques qui ont lieu sur le terrain de la vie présente et avec des armes empruntées à l’ordre de choses actuels. Mais il n’y cède pas. Il déclare que ce n’est pas une raison pour lui, bien qu’il soit homme, de combattre à la manière des hommes. Il ne prend conseil ni de l’intérêt personnel, ni de l’amour propre, ni de la crainte. Il ne mettra en avant, pour influencer ses amis de Corinthe, aucun des mobiles qui agissent avec une irrésistible puissance sur l’homme naturel : ni la vanité, ni la flatterie, ni l’intérêt. Il y a longtemps qu’il a jeté loin de lui de telles armes. Point de fausse charité ! pas de calculs ! pas de politique humaine ! Champion de Dieu, il ne combat qu’avec les armes de Dieu.

Comment est-il arrivé à ce dépouillement, à ce désintéressement, à cette liberté ? Qu’est-ce qui a tué en lui l’homme de parti, élargi l’horizon étroit de ce pharisien, ouvert dans ce cœur une source inépuisable de sympathie et de charité ? La grâce de Dieu. Cette grâce, d’un mort a fait un vivant ; c’est par elle qu’il a fait plus que tous les autres, et même si c’est si peu lui qui a travaillé, qu’après s’être mis en avant il se cache derrière cette grâce et affirme que ce n’est pas lui, mais que c’est elle qui a tout fait.

La grâce de Dieu n’est pas tout ; elle a frayé le chemin à quelque chose de meilleur. Le donateur vaut mieux que le don : c’est le donateur qui vient s’incarner de nouveau, pour ainsi dire, dans une chair mortelle. C’est le divin qui s’unit à l’humain.

Pas de vues mesquines, pas de sentiments jaloux, pas de préoccupation personnelle. Il n’y a plus rien de cela en lui, parce qu’il n’y a rien de cela en Dieu. Le même esprit n’est-il pas dans le disciple et dans le maître ? C’est cette identité de l’esprit qui crée la ressemblance extérieure. Ce n’est plus moi qui vis, dit-il. C’est bien lui, pourtant. Mais comme il est devenu un même esprit avec le Seigneur et que tous ces sentiments ont été absorbés ou plutôt transformés, qu’il ne se détermine plus que par des considérations d’un ordre céleste, il affirme que c’est Christ qui vit en lui.

 

Nombres 22, 31 : Alors l’Eternel ouvrit les yeux de Balaam et il vit l’ange de l’Eternel.

 

Le Seigneur laisse aller Balaam et l’arrête. Il le laisse aller parce qu’il voit que tout son désir, toutes ses convoitises sont tournés de ce côté-là, et cependant il l’arrête parce qu’il faut que cet homme sache qu’il suit un mauvais chemin. Quel avertissement ! Un ange, l’épée nue à la main, qui lui barre la voie ! L’épée n’est pas de trop. Un meurtre pour en empêcher un autre, un plus grand. La mort du corps pour prévenir celle de l’âme !

Balaam ne voit pas l’ange. Est-ce qu’un homme qui convoite s’occupe d’autre chose que de son objet ? L’ânesse voit l’ange. Balaam ne le voit pas. Est-ce dans l’ordre ? La passion l’aveugle. Il faut que l’Eternel lui ouvre les yeux.

Sur le chemin du mal, que d’aveugles volontaires ! Avec quelle ardeur on se précipité vers l’objet de sa passion ! On y va les yeux fermés, si connu en est le chemin et si résolu est-on à ne se laisser arrêter au premier détour du chemin et nous ramener en arrière ; il donne une voix aux choses muettes. Le plus souvent ces avertissements nous sont en pure perte. Néanmoins, heureux celui qui est ainsi averti, dût-il même n’en tenir aucun compte. C’est quelque chose que de voir l’abîme où l’on tombe. Mais quel profit y-a-t-il dans cette lumière, si elle n’est pas une force ?

Il y a une espérance.

Le rayon qui éclaire ma chute me fait croire à la main qui se tend pour me relever. Ce sont deux formes de la même miséricorde.

 

Nombres 23, 21 a : Il n’a point aperçu d’iniquité en Jacob, il n’a point vu de perversité en Israël.

 

Et pourtant, il y a l’un et l’autre. Toute son histoire n’est que l’histoire de son iniquité et de sa perversité. Comment l’Eternel ne les voit-il pas ? Parce qu’il a mis entre elles et lui son Fils bien-aimé, parce qu’il les a pardonnées à son peule, parce qu’il les a jetées au fond de la mer et qu’il ne s’en souvient plus. Elles ont été ; elles ne sont plus.

Il ne voit ni iniquité ni perversité en moi. Jésus les couvre. Jésus les efface : Venez maintenant, débattons nos droits ; quand même vos péchés seraient comme le cramoisi, ils seront blanchis comme la neige ; car il y a une source ouverte en Israël pour laver le péché et la souillure (Esaïe 1, 18). Telle est la signification du sacrifice de Jésus-Christ. C’est cela ou rien. Si ce n’est rien, mon péché demeure. Si c’est cela, mon péché est ôté. Jésus est Sauveur ou Juge. S’il n’est pas l’Agneau qui ôte le péché du monde, il est le juge impitoyable qui me condamne par sa parole et même sans parole, par la pureté de sa vie, par la réalisation de l’idéal. Mais il est bien cet Agneau de Dieu qui s’est donné pour être immolé à ma place et me couvrir de son innocence et de sa justice. Je le reconnais pour tel parce que l’Ecriture me le montre, et parce que j’en suis où j’en suis. Je marche sur les hauteurs, mon cœur est détaché du mal, l’esclave est affranchi ; celui qui n’était autrefois que le misérable jouet de la tentation, un composé de convoitise et d’égoïsme et de haine, est maintenant purifié, pénétré du divin comme le cristal est traversé par la lumière. Sans lui, je n’eusse fait ni ce dernier pas, ni même le premier. Je vivrais dans le mal ; j’en aurais pris mon parti ; je serais misérable. Qui pourrait dire à quel degré de profondeur je serais descendu dans l’abîme ? j’aurais été jusqu’au fond. Il y a beaucoup de mal dans ma vie, même après que j’ai cru. Mais comme le mal aurait coulé à pleins bords, si je n’avais cru ! Je suis ce que je suis, c’est-à-dire pardonné, relevé, mis en contact avec le divin, transformé de gloire en gloire à son image, plus rayonnant aujourd’hui que je ne l’étais hier, comme je serai demain plus fidèle, plus affermi, plus joyeux que je ne le suis aujourd’hui. Je suis ce que je suis, parce qu’Il est ce qu’Il est, c’est-à-dire sauveur, rédempteur, justificateur, réparateur des brèches, ressusciteur des morts.

 

Nombres 23, 21 b : L’Eternel son Dieu est avec lui et il y a un chant royal de triomphe.

 

C’est bien cela. Un chant de triomphe, parce que l’Eternel son Dieu est avec lui. La force et la joie sont au lieu où il habit-e.

La paroi qui est devant moi, obscure il y a quelques minutes, resplendit à cette heure, parce que le soleil y donne. Là où portent ses rayons, il s’allume un incendie de gloire : le moindre débris de verre étincelle, le grain de sable lance des feux.

Il y a un chant royal de triomphe dans mon cœur, parce que le Seigneur y habite.

 

Matthieu 7, 22 : N’avons-nous pas prophétisé en ton nom ? n’avons-nous pas fait des miracles en ton nom ?

 

J’en connais qui ont fait tout cela et qui aujourd’hui n’ont plus rien de commun avec Jésus-Christ. Ils n’ont pas attendu le moment de la sentence. Ils se sont jugés eux-mêmes. Jésus-Christ n’est plus rien pour eux ; a-t-il jamais été quelqu’un ?

Cependant, ils ont prophétisé en son nom. Avec quelle ardeur, avec quelle éloquence ! Ils avaient la foule et la renommée. Tout cela était-il joué de leur part . Etaient-ils hypocrites ? Sous couleur d’amener des âmes à Jésus-Christ, faisaient-ils leurs petites affaires ? Non. Ils étaient droits, consciencieux. Ils faisaient du bien. Parmi les rachetés, il y en a qui les désigneront au dernier jour comme leurs pères spirituels.

Que s’est-il donc passé ?

Ils n’étaient que des mineurs travaillant à l’exploitation d’un riche gisement de diamants. C’étaient des diamants de la plus belle eau qui passaient par leurs mains et qui étaient reçus par d’autres mains avides avec des exclamations de joie. Il passe des millions par les mains de l’ouvrir, mais il n’en garde rien : il est tout aussi indigent, tout autant en guenilles à la fin de la journée qu’à la première heure. Les mineurs, eux, se connaissent en diamants et apprécient à leur valeur ceux qu’ils découvrent. Mais je soupçonne ceux qui ont exploité la riche mine de l’Evangile d’avoir eu pour leurs découvertes d’autres yeux que ceux de la foule : ce qui était du diamant pour elle n’était pour eux que du strass.

 

2 Corinthiens 11, 23 – 29 : En danger sur les rivières, en danger des voleurs… dans les peines, dans les travaux, dans les veilles, dans la faim, dans la soif, dans les jeûnes, le froid, la nudité…

 

Quelle énumération de maux ! page à relire souvent ; à relire quand on a un mal de tête un peu persistant ou qu’on ne trouve pas du jour au lendemain un local convenable pour y ouvrir des conférences. Il n’y a pas lieu de se décourager. Le mal passe, les difficultés disparaissent et le Seigneur reste. Quelle précieuse expérience que celle-là ! Les jours se succèdent ; hier, un ciel bleu ; aujourd’hui, un soleil voilé, une nuit remplie de rêves étranges ; et, au moment où les yeux s’ouvrent, où l’on reprend possession de soi-même, où l’on semble commencer la vie à nouveau, toujours la même figure devant soi, toujours la même présence qui remplit le cœur. On éprouve des tressaillements subits de joie à ce contact divin, à la pensée que c’est pour toujours, que ce n’est pas une idée qui a traversé l’esprit, mais que c’est un état auquel on est arrivé, un épanouissement de la vie divine, une nouvelle étape dans la lumière. Qu’il n’y ait plus rien qui ressemble à cela dans la vie de saint Paul, qu’il devienne possible qu’il ne soit plus un même esprit avec le Seigneur, et il en aura bien vite assez de cette vie de souffrance : il trouvera que le jeu n’en vaut pas la chandelle.

 

Nombres 24, 2 : L’Eternel t’a empêché d’être honoré.

 

Quelle parole habile ! quel adroit coup d’épée au défaut de la cuirasse ! comme Balak connaît à fond l’homme qui vient de si bien parler ! Il a promis de grands honneurs ; sa parole est une parole royale ; il était prêt à combler de biens le prophète, s’il avait fait quelques concessions, s’il était entré un peu dans les vues du roi. Mais non, il est resté in flexible ; au lieu de maudire il a béni. Tant pis pour lui ; la main royale qui s’ouvrait pour laisser tomber honneurs et richesses se referme. Balaam était pauvre à son arrivée, pauvre il s’en retournera. Mais qu’il ne s’en prenne qu’à l’Eternel : c’est son obéissance servile qui lui a nui. C’est l’Eternel qui t’a empêché d’être honoré.

Balaam ne peut pas renoncer à son gain. Il s’arrangera pour le recevoir, tout en ne retirant aucune des paroles qu’il a prononcées en son nom. Sa conduite démentira ses paroles. Il a béni ce peuple, et maintenant il va mettre une pierre devant lui pour le faire tomber.

Balaam parlait au nom de l’Eternel ; il était maîtrisé par Lui. Il se refusait à dire autre chose que ce que l’Esprit de Dieu lui mettait sur les lèvres. Mais il n’étais pas en communion avec Lui. Il y avait chez lui deux hommes : celui qui parlait d’après l’Eternel, et celui qui convoitait d’après son propre cœur, - l’Esprit de Dieu qui le visitait quelquefois, et l’esprit de cupidité qui se trouvait à demeure chez lui.

 

Pas de  citation.

 

Quand je lis, comme je le fais en ce moment, la description des plus belles parties de l’Australie, - grands fleuves descendants à travers les rochers, arbres gigantesques, lointains merveilleux-, je tressaille. Est-ce qu’il y a, dans le sentiment que j’éprouve, une ombre de regret de n’être plu en âge ou de n’avoir jamais été en mesure de me donner de pareils spectacles ? Non. La terre me fait penser au ciel et je me dis : si la terre où je ne fais que passer est si belle, que sera-ce du ciel où je dois vivre toujours ? Les larmes me viennent aux yeux, et ce coin du monde où je vis s’illumine subitement de l’éclat de la lumière qui vient d’en haut.

 

Pas de citation.

 

Il ne faut pas que ceci reste dans le domaine de la spéculation pure. Ce qui est dans l’esprit ne doit pas être toujours à l’état de devenir dans la vie. Le Dieu qui est en moi doit se manifester dans mes actes. Si tout est changé au dedans, tout doit être transformé au dehors. Je me garde bien de faire le raisonnement faux d’autrefois : Il n’est pas ici, donc Il n’est pas là. Je dis au contraire : Il est là – en posant la main sur mon cœur, - et Il doit être partout dans ma vie. Mon continuel effort, le sien, doit consister à ce que mes œuvres le manifestent aussi clairement qu’il s’est manifesté à mon esprit. Etre en Dieu et faire les œuvres du diable se comprend aussi peu que faire les œuvres de Dieu quand on est possédé du démon.

Il faut ! c’est une conséquence forcée, c’est la loi éternelle qui lie la cause à l’effet, c’est l’arbre qui porte le fruit de sa nature, c’est le flot qui coule sur sa pente, c’est la lumière qui rayonne. Le ver qui rampe au pied des haies enverrait sa pâle clarté jusqu’aux espaces célestes, et mon esprit, qui est devenu lumineux par son contact avec la lumière éternelle, n’éclairerait pas mes œuvres, toutes mes œuvres de son éclat divin !

Allons, vieil esclave blanchi au service du mal, ne reste pas les bras pendants comme si des chaînes les chargeaient encore. Homme nouveau, fais les œuvres de ta nouvelle nature.

 

Nombres 27, 18 : Prends Josué, fils de Nun, un homme en qui réside l’Esprit.

 

Qui doit parler ? Le plus éloquent, le plus savant, le plus intelligent ? Non : celui en qui réside l’Esprit.

C’est la condition essentielle. Certes, Josué avait les qualités qui font un bon général : le courage, l’intelligence qui fait trouver les moyens, avec la rapidité et la fermeté dans l’exécution. Aucune de ces vertus n’est mise en avant pour justifier le choix que l’Eternel a fait de lui comme remplaçant de Moïse. Il n’y a qu’une chose qui le qualifie : il a l’Esprit de Dieu.

Pour faire l’œuvre, la grande œuvre, à Paris ou a Fourchambault, je n’ai rien de ce que les hommes possèdent qui les pousse à parler, à se mettre à la tête d’un mouvement, à le provoquer. Ils ont le sentiment de leur valeur, ils comptent sur eux-mêmes et ils marchent.

On ne se fait pas d’idée des lacunes qu’il y a chez moi quant à ces qualités essentielles pour faire un orateur ou un tribun.

Il n’y a qu’une chose qui me qualifie. Ce n’est ni l’à-propos, ni la facilité d’élocution, ni le mouvement, ni l’abondance de la pensée. Il m’est arrivé quelquefois de souhaiter vivement de posséder tout cela ; mais le Seigneur qui m’en a privé a voulu montrer, en m’en privant, que son œuvre pouvait s’en passer et qu’il n’y avait qu’un don essentiel capable de remplacer avantageusement tous les autres : le don de l’Esprit.

J’en ai revêtu quelquefois, mais temporairement et comme en passant. Quand j’avais parlé sous cette influence, j’avais peine à reconnaître ma parole naturellement timide et embarrassée. Le Seigneur voulait, par ces éclairs éblouissants qui traversaient mon crépuscule, me montrer ce que je pourrais faire et dire, si le rayon fugitif passait à l’état de clarté permanente, si l’ondée qui remplissait à peine le creux de ma main devenait un océan.

        La lumière est venue ! Je nage en pleine eau ! Le Seigneur, en m’unissant à lui, m’a fait être un même Esprit avec lui. Je peux le glorifier. Mais quelquefois j’ai peur de m’attribuer quelque chose et de voler, pour me l’approprier, une partie de la gloire qui lui appartient. Que le don lui-même me défende contre ce danger. Ce n’est pas en m’appauvrissant qu’il m’en mettra à l’abri. Avec un peu de l’Esprit du Seigneur, je puis croire que tout vient de moi. Avec la plénitude de cet Esprit noyant le mien, tout en respectant ma personnalité, je ne cours pas le risque de m’en vanter comme s’il était à moi. Que je prenne garde aussi de le mépriser ; et ce serait le mépriser que de n’en pas tenir grand compte.

 

Première conférence à Fourchambault

 

Qu’est-ce qui me préoccupe ?

La crainte de ne pas glorifier Dieu ?

Mais c’est un soin que je dois lui laisser. Il suffit que ce soit mon désir, et que je marche dans cette voie. Tout le reste dépend de lui.

Mais si c’était le soin de sa gloire, serais-je préoccupé au point où je le suis ?

Je ne le crois pas.

La préoccupation est plutôt personnelle. Je crains d’échouer… Non ; je retire le mot ; j’en retire même la pensée. Si j’étais seul, cette crainte égoïste pourrait m’absorber ; mais Il est avec moi. Il est avec moi aussi certainement que le soleil m’éclaire.

Je ne suis rien ; je ne sais rien ; je ne peux rien.

Mais il est tout ; il sait tout ; il peut tout.

Tout donc ira bien si je consens à me laisser diriger ; si je veux bien suivre son programme ; si je lui laisse toute la place ; si le moi égoïste et personnel est absorbé ou plutôt transformé par le moi divin. Offrirai-je ce phénomène d’être un même esprit avec lui et d’avoir les sentiments et les appréhensions de la pauvre créature abandonnée à elle-même ? Ce n’est pas possible. Et cependant vois, Seigneur ! Il y a là une étrange anomalie que présente celui qui a eu la fièvre et qui, tout guéri qu’il est, éprouve encore aux heures où elle régnait quelque chose qui y ressemble, ou celle de l’amputé qui souffre encore dans le membre malsain qui lui a été retranché pour lui sauver la vie. Ce sont là de vieilles habitudes. J’ai été si souvent seul que, tout en ayant aujourd’hui le Seigneur avec moi, je vois l’avenir et j’en calcule les chances comme s’il en était absent. J’ai donc besoin qu’il me dise : Ne crains point, je suis avec toi ; très fort et vaillant homme, va, avec cette force que tu as ; ne suis-je pas Celui qui t’envoie ?

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20 septembre 2013 5 20 /09 /septembre /2013 13:13

 

 

chaine accrochée à une pierre

 

Une longue chaîne… d’« aimants  Dieu » (numéro 036)

                  

Combien de maillons de la chaîne souhaitez-vous voir ? Où se trouve le premier maillon ?

Et vous ? Où êtes-vous ?

 

QUELQUES VISAGES AVANT LE TEMPS DE LA REFORME (3)

 

 

FRANCOIS VATABLE ( ? - 1547)

 

Avec François Vatable, nous faisons un clin d’œil reconnaissant à tous les professeurs en université qui restent, bien souvent, dans l’anonymat pour le grand public. Leurs élèves en parlent, et leurs élèves, ce sont nos pasteurs ! Que seraient nos pasteurs sans eux ?

Puits de connaissance, un don incontesté pour la communication et l’enseignement, ce professeur d’hébreu au « Collège Royal » que nous connaissons aujourd’hui sous son appellation de Collège de France, établissement prestigieux s’il en est, a commenté les Ecritures. Robert Estienne[1] publia ses commentaires qui suscitèrent un tollé général parmi les « Sorbonistes ». Il a, entre autres, revu les notes sur « les douze prophètes » du rabbin Kimhi[2].

C’est lui qui restaura l’étude de l’hébreu en France contre l’avis de la Sorbonne[3] qui craignait un renouveau du judaïsme. Membre du cénacle de Meaux, il fut aussi le professeur d’hébreu de Calvin.

Malgré la main tendue, très appuyée, des protestants, il restera catholique.



[1] Images de la Bible publiée par Robert Estienne : http://www.godsnaam.be/bibles.htm : première page de la Bible vulgata clementina et versio latina

[2] Exégète, grammairien, poète provençal  du XIIème siècle. Ses fils se tailleront aussi une jolie réputation ; l’un d’eux (David Ben Joseph Kimhi)  était parmi les commentateurs préférés de Luther. (wikipédia)

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17 septembre 2013 2 17 /09 /septembre /2013 20:23

De nouveaux livres, chaque jour… et j’imagine ceux  d’entre vous qui peuvent avec profit lire en anglais, espagnol, allemand, japonais, néerlandais … et il y a des librairies réelles et toutes les virtuelles ! Comment choisissez-vous ?

Vous savez ma prédilection pour les vieux machins du siècle dernier qui jaunissent sur les étagères de mes bibliothèques… et  mon goût immodéré pour les écrits des pasteurs disparus il y a longtemps…

Alors, comment s’arrêter, dans le flot ininterrompu des offres juteuses de première de couverture qui me tombent sous  les yeux,  sur LE livre que je vais ouvrir et qui sera mon compagnon pour deux ou trois semaines ?

Le dernier d’Elian Cuvillier qui commente l’épitre de Jacques ? un de ceux dont la recension figure dans le Cep ? ceux qui fleurissent sur l’étagère des nouveautés à la fac de théo ? rester à l’écoute de vos propres élans ? entendre l’avis jubilatoire que l’un de vous émet sur Facebook ? et toutes les pub des éditeurs qui tombent régulièrement dans ma boite courriel ?

J’ai trouvé une aide intelligente et avisée sur le site « Miettes de Théologie » rubrique « Théolivres »… bien que mes « lettres théologiques » soient du niveau « Heidi chez les schtroumpfs»… c’est dire ! et même si, au moins sur un livre, je suis beaucoup plus enthousiaste que le webmaster, (A l’aube du christianisme de D. Marguerat) à l’exception des mots « doctorants » qui ne figurent dans aucun dico et donc qui restent un mystère pour moi… c’est bien sûr parce que je sais peu de choses et qu’apprendre m’enthousiasme. Donc, une aide qui me tente : http://miettesdetheo.over-blog.com/tag/Théolivres/

Si le cœur vous en dit…

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16 septembre 2013 1 16 /09 /septembre /2013 22:12

La faculté de théologie de Genève a mis au point 5 semaines de cours (pas de conférences) sur Calvin : "histoire et réception d'une réforme".. Vous pouvez vous inscrire (c'est gratuit) sur le site : http://www.unige.ch/theologie/actualites/mooc.html

 

Et pour les amateurs, n'oubliez pas Théovie, site internet de l'Eglise protestante unie de France pour l a formation biblique et théologique. Gratuité assurée... http://www.theovie.org/

 

 

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16 septembre 2013 1 16 /09 /septembre /2013 22:07

CARCASSONNE

 

DIMANCHE 2 SEPTEMBRE 2012

 

DEUTERONOME 4, 1 – 8

MARC 7, 1 – 23 

 

Introduction : Zippporah Zederbaum,  née en Roumanie, a épousé Isaac Zederbaum il y a neuf ans à Tel-Aviv. Un bien mauvais mari, qui ne lui donnait pas d’argent et l’abandonna plus tard pour une jeune Yéménite qu’il abandonna aussi pour partir chercher fortune aux Etats-Unis, où il trouva la mort dans un accident d’autocar. Elle avait le certificat de mariage juif, le certificat de décès signé par un rabbin américain et légalisé, son acte de naissance, le tout prouvant qu’elle était une bonne juive. Elle vient d’être demandé en mariage, mais les juges rabbiniques ont découvert qu’un frère de son mari défunt vit encore en Roumanie. La loi est formelle : « Lorsque des frères demeurent ensemble et que l’un d’eux mourra sans enfants, la femme du défunt ne se mariera point au dehors avec un étranger (…) s’il refuse, sa belle sœur s’approchera de lui, à la vue des anciens, lui ôtera son soulier du pied et lui crachera au visage » (Deut. 25). Voici la réponse du frère de son mari : « aux rabbins de Jérusalem : il me semble comprendre, en lisant l’invraisemblable document que vous m’avez envoyé, que ma belle sœur Zipporah, dont le mari est mort, n’est pas libre de se remarier si je ne signe pas un papier déclarant que je n’ai pas envie de l’épouser et que je l’autorise à épouser qui lui plait. J’ai cru comprendre aussi que si je me trouvais à Jérusalem, ma belle sœur serait obligée, en apprenant que je ne veux pas l’épouser, de me déchausser un pied et de me cracher à la figure.  Nous sommes aux XXe siècle, et si je me livrais de quelque façon que ce fût à ces rites du Moyen-âge, les autorités roumaines me considèreraient à bon droit comme un crétin ou un fou. Je refuse de signer ces absurdités et je vous conseille d’oublier cette histoire ridicule. » Zipporah Zederbaum est condamnée, désormais, soit au célibat, soit à un concubinage dont pourrait naitre des enfants qui aux yeux de tous en Israël, seraient des bâtards avec des conséquences ravageuses dans leur vie d’enfant puis d’adulte. [1]

Jésus, en son temps, a posé dans notre texte en particulier la « radicale nouveauté de l’Evangile par rapport à toute tradition religieuse, à commencer par celle qui a pourtant été la matrice de la foi chrétienne ». Ce matin je souhaite que nous partagions quelques instants de méditation sur ce qui, parfois, si ce n’est souvent, vient faire passer notre vie dans l’étroit goulot des traditions établies, des convictions immuables toutes faites (faites surtout par les autres, des regards généralisant du groupe à l’individu : c’est un rom… alors, un voleur ; et pourquoi pas, c’est un français, forcément il ou elle est rouspéteur et fraudeur… Je vous dirais quelques mots dans un premier point sur la tradition rabbinique face aux Ecritures, puis, dans un deuxième temps nous parlerons de la Parole en nous mais quelle Parole ?

 

1) la tradition rabbinique : « les Pharisiens et tous les autres Juifs obéissent à la tradition de leurs ancêtres : avant de manger, ils se lavent toujours les mains avec soin. 4  Quand ils reviennent de la place publique, ils se lavent toujours avant de manger. Ils respectent aussi beaucoup d’autres coutumes qu’ils ont reçues des ancêtres : par exemple, la façon de laver les verres, les pots et les plats. 5  C’est pourquoi les Pharisiens et les maîtres de la loi disent à Jésus : »  Tes disciples ne vivent pas selon la tradition des ancêtres. Ils mangent avec des mains impures. Pourquoi donc ? »

La vie d’un juif est un ensemble de pratiques issus de l’obéissance à des prescriptions sur trois niveaux. D’abord, la Torah. Ses commandements sont immuables et sans appel. Ils sont écrits et recopiés génération après génération avec une application qui requiert des spécialistes aux compétences d’écriture très pointues. Il ne faudrait pas changer une seule lettre de la Loi. Mais la vie évolue et les hommes avec, alors, au fil des temps, les rabbins ont décidé des applications qui étendent chaque commandement aux gestes de la vie quotidienne. Et leurs décisions sont devenues « un ensemble de normes juridiques, de règles transmises oralement d’une génération à l’autre, de maitre à disciple », le talmud, la tradition[2]. Et leur autorité était placée au même niveau que l’autorité de la Torah. Mais il y a un troisième niveau ; après la Torah et la tradition, viennent les coutumes, pratiques adoptées dans une ville, une région, une communauté, la mischna. Exemple : « De nos jours comme les toilettes et les salles de bains ne sont plus des lieux sales comme auparavant, on peut se contenter de se laver les mains à l’eau courante, sous le robinet »[3] mais il est des lieux où il n’y a pas d’eau, alors la coutume a établi une règle : on peut se laver les mains avec de l’herbe ou du sable. Ainsi, le commandement peut être appliqué par tous et nul ne peut dire : « cela m’était impossible ». Des codes de vie obligatoires gérés par les chefs religieux juifs. C’est sans fin, quand on pense aux découvertes technologiques des derniers siècles.

Il faut se rendre à l’évidence : « le Seigneur a confié son message à des humains avec tous les risques que cela comporte, en particulier le risque qu’ils mélangent leurs propres idées avec le message de Dieu dont ils sont les porteurs. »[4]

 

2) Parole écrite et Parole Vivante : Chacun de nous se sait porteur de la Parole, mais quelle Parole ? La parole écrite, la Bible, ou une Parole vivante, Christ en nous, ou les deux ? C’est là certainement ce qui fait toute la différence avec le judaïsme. Origène dit de Christ qu’il est « la lumière véritable, la lumière du monde, la lumière des hommes »[5]. Cette lumière transforme en nous l’Ecriture en vie. Quand nous ouvrons les pages de la Bible, Parole écrite, nous pouvons y lire des prescriptions, des commandements, des ordres, des interdictions et pas seulement dans le 1er Testament. Paul, Pierre, Jacques rappellent à leurs contemporains l’obéissance due au Seigneur dans de nombreux domaines. Nous lisons chaque jour ces exhortations. Et nous pourrions rajouter aussi des niveaux en nous laissant guider par les commentaires de Calvin ou de Luther par exemple … puis par des commentaires de théologiens de notre siècle. Ils sont légions ceux qui ont tenté de dire comment ils recevaient la Parole Ecrite. Mais au XXIe siècle, les commentaires ne sont ni notre Talmud (la tradition), ni notre Mischna (les coutumes) car s’ils enrichissent nos vies, ouvrent à la réflexion sur tel ou tel sujet, Christ en nous, Parole vivante, nous rappelle sans cesse comment il a résumé le tout : « Tu dois aimer le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ton intelligence et de toute ta force. (…)Tu dois aimer ton prochain comme je vous ai aimés »[6]

L’amour est unique : celui que l’on reçoit et celui que l’on donne. Celui que nous recevons parce qu’il vient poser sur notre vie le regard de Dieu, un regard qui nous dit : « tu es unique pour moi, je sais, je sais ta vie, je sais tes joies, je sais tes peines, je sais tes déchirements, je sais tes refus, je sais tes doutes… je sais… et je t’aime, je t’aime tant que rien ne peut me séparer de toi sauf toi, parfois… en moi, tu es libre »[7] Comment cet amour là ne serait-il pas unique ? Et l’amour que nous vivons en retour pour Dieu et pour nos semblables à cause de celui que nous avons reçu d’abord est aussi amour unique, chemin d’accueil, d’ouverture, de liberté.

Voilà pourquoi nous expérimentons chaque jour que, comme nous, nos frères et sœurs traduisent ces amours là en œuvres, en décisions, en positions éthiques ou théologiques qui leur sont propres et bien souvent aux antipodes des nôtres. De nombreuses discussions s’ouvrent aujourd’hui dans l’Eglise protestante unie sur des sujets autrefois condamnés et tabous. N’est-ce pas justement parce que les Ecritures ne sont ni Loi, ni tradition, ni coutumes pour nous ? Bien sûr, cela conduit, parce que nous sommes humains, à plus que des discussions. Je crains même que l’avenir ne nous réserve quelques disputes d’exception agrémentées de portes claquées qui feront date dans l’histoire du protestantisme. Tant qu’il aura des hommes, il y aura de l’hommerie, disait Chouraqui….Les discussions viennent de la Lumière en nous, vous savez, la lumière véritable, la lumière du monde, la lumière des hommes et les portes claquées de l’hommerie de l’humain persuadé qu’il reçoit, lui seul, comme une espèce d’exclusivité transcendante la compréhension et l’actualisation de la Parole.

 

Conclusion : Aucun de nous ne peut changer un iota dans la vie de Zipporah, dans l’imbroglio que lui imposent le tribunal rabbinique de Jérusalem. Nous ne pouvons même pas en sourire car c’est le quotidien de beaucoup de femmes en Israël. Avez-vous visionné les 3 reportages sur France 5 intitulés : « juive, condamnée au mariage » ? C’est le quotidien de toutes les « Zipporah » et, pardonnez l’audace verbale, tous les Zipporo qui vivent dans l’espace fermé des décisions sans appels que nous formulons au nom de notre lecture de l’Ecriture. Rabbin ashkénaze orthodoxe, et si c’était moi, et si c’était toi ?

Je viens dans ta vie, dit le Seigneur, pour la vivre avec toi, en toi. Je viens éclairer la Torah, la tradition, les coutumes, j’apporte ici, aujourd’hui, dans ton cœur, la lumière de mon amour. Zipporah est mon enfant, libre. Toi, ne deviens pas sa prison.

 

Ecoutez, en conclusion, Khalil Gibran :

Vous aimeriez

Que je vous parle de Jésus,

Mais comment puis-je enfermer

Le chant de la passion du monde

Dans un roseau creux ?[8] Amen



[1] James Michener « La Source » page 577-278

[2] encyclopédie du judaïsme articles « coutume » et « tradition »

[4] erf pole national formation

[5] Origène commentaire de l’Evangile de Jean tome 1

[6] Marc 12, 30-31

[7] extrait de ma prédication du 22 08 2012 à Pomeyrol

[8] Khalil Gibran Jésus, fils de l’homme chez Albin Michel

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13 septembre 2013 5 13 /09 /septembre /2013 10:56

Cher(e)s ami(e)s

Les petits chérubins sévissent enfin dans les cours des écoles… et plus dans la maison… (chers professeurs des écoles, chers enseignant(e)s… ) et vous, dans la maison silencieuse et vide, que faites-vous ? Attention, ceci n’est pas un pensum… c’est une formidable opportunité d’user autrement du temps libre offert.

 

Et voilà déjà une occasion qui se pointe à la porte, celle que nous offre la paroisse de Muhlbach (l’ai-je bien écrit ?) qui nous interroge : « quelles fêtes célébrons-nous durant l’année ecclésiastique et que représentent-elles » ? C’est à vous… http://www.protestants-muhlbach.fr/quelles-fetes-celebrons-nous-durant-lannee-ecclesiastique-et-que-representent-elles/

 

Et pour faire passer la pilule de ce devoir de rentrée, pourquoi ne pas danser « la polka de la réformation » ? hein ? (rubrique « culture », sous-rubrique « orgue »). Evidemment, c’est en anglais mais voilà, en musique, un petit détour délassant. Pour ceux qui peuvent, je joins le site qui explique, phrase par phrase la signification des paroles de la polka. Et qui sait si l’un ou l’une d’entre vous n’en fera pas un peu plus et mettra le tableau explicatif en français pour que nous profitions pleinement de cette idée pas si saugrenue qu’elle le parait… donc, d’abord la musique : http://www.youtube.com/watch?v=WU0f_qJLkLg et l’explication détaillée http://thekingdomcome.com/explaining_refpolka.
Et dans la même rubrique, si vous écoutez l’ode à la joie en Alaska, les catéchètes mettront peut-être la trouvaille dans un coin de leur agenda… pour former les enfants.

Ah ! j’oubliais ! voici  l’adresse du site de la paroisse de Muhlbach, si le cœur vous en dit : http://www.protestants-muhlbach.fr/

 

Dimanche, journée de rentrée à Narbonne (culte à 10 h 30, repas paroissial et l’après midi : ciné théo « Mauvaise foi »)  et à Perpignan (culte à 11 h, repas paroissial et l’après-midi conférence avec le professeur Elian Cuvillier : « Vivre la confiance en temps de crise : un regard biblique).

 

Demain, pour moi, suite de la formation avec  l’association des soins palliatifs. Billet du samedi en avance d’un jour donc…

 

En avance, en retard ou « à l’heure », Il est le maître du temps… pourquoi s’inquiéter ? La montre ne semble pas être un objet fétiche pour Lui… alors, chacun(e) à son rythme, chacun(e)avec ses devoirs de rentrée, chacun(e) avec sa musique, et quelle que soit la langue qu’il ou elle parle, avançons  et … si on le faisait, ensemble, en chantant ? http://www.youtube.com/watch?v=SXh7JR9oKVE

 

Amitiés

 

Jo

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