Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
22 juillet 2013 1 22 /07 /juillet /2013 11:05

vous aviez déjà la référence de la vidéo. voici son homélie à lire sans modération !

 

 

http://www.youtube.com/watch?v=Rb4H2-Brw00

 

 

PERE HENRI BOULAD, JESUITE

 

 LA FOI AU DELA DE  LA FOI

1 ROIS 8, 41 -   . LUC 7, 1 – 10

 

 

 

Je pense que vous avez tous entendu parler du Dalaï lama qui est le chef de la communauté bouddhiste dans le monde qui compte des centaines de millions d’adhérents. Une spiritualité très profonde de dépouillement d’union à l’absolu. Eh bien, un  jour on demandait au Dalaï lama, cet homme drapé d’un saris safran, crane rasé, bien connu. On lui demande quelle est la meilleure des religions ; et lui de répondre : la meilleure des religions est celle qui rend l’homme meilleur. Génial ! La meilleure des religions est celle qui rend l’homme meilleur. Vous allez me dire : alors c’est pas le christianisme ? il n’y a pas de religion en soi comme ça, devant, comme une espèce d’idole. Et c’est parce que les hommes ont fait des religions des espèces d’idoles qu’ils ont été pris dans un piège.

Moi je suis juif, je suis donc du peuple choisi ; moi, je suis chrétien, je suis donc du peuple choisi ; moi je suis musulman, je suis donc du peuple choisi. Et chacun s’imagine que parce qu’il appartient à telle religion, il ira au ciel. Vous allez me dire, alors, tous égaux ? Réfléchissons un peu à ça. A partir de l’Evangile d’aujourd'hui, où nous avons un païen, un centurion, un officier qui avait sous son obédience une centaine de soldats. Païen : et voilà que cet homme fait l’admiration de Jésus par sa foi. Il dit à Jésus : moi, je donne des ordres qui sont exécutés, et toi, tu peux donner des ordres et mon serviteur sera guéri. Et Jésus dit : en vérité je n’ai pas trouvé une telle foi dans Israël, je n’ai pas trouvé une telle foi dans mon peuple, ce peuple qu’on dit choisi de Dieu, élu de Dieu. Et ailleurs il dit : les gens viendront d’orient et d’occident et prendront place à la table du Royaume de Dieu. Je suis frappé par des tas de phrases de Jésus  qui ouvrent la porte du royaume beaucoup plus large que nous ne l’avions fait jusqu’à présent. Qui entre au ciel ? les catholiques. Qui entre au ciel ? les orthodoxes. Qui entre au ciel ? les chrétiens ? Qui entre au ciel ? les musulmans ? Qui entre au ciel ? Les juifs. Qui entre au ciel ? Ceux qui ont pris la green card, ceux qui ont pris le visa, ceux qui ont pris le tampon et ils sont inscrits dans la liste alors nous sommes tranquilles, nous. 

Ce qui me frappe dans l’Evangile, dès le début de l’Evangile, c’est l’histoire des rois-mages. Des païens eux aussi, des païens, mais fidèles à leur lumière intérieure. Fidèles aux signes du ciel qu’ils contemplaient chaque soir ; ils voient une étoile qui leur fait signe et ils la suivent. Ils quittent leur maison, ils quittent leur pays, et pendant des mois et des semaines ils arrivent à l’enfant de Bethléem. Et bien moi je dirais ceci : toute personne fidèle à son étoile sera conduite aux pieds du petit Jésus, connaitra Jésus, connais déjà Jésus. Nous arrivons à une conception de la foi plus large que celle à laquelle nous pensions : la foi en Jésus, la foi en l’Eglise, la foi dans le christianisme. Oui, bien sûr. Ce n’est pas exclu, au contraire. Mais je vous dirai tout à l’heure ce que j’en pense.

Mais est ce qu’il n’y a pas une foi plus large que la foi. Etre croyant c’est toujours être chrétien ? avoir la foi c’est toujours adhérer à l’Evangile ? Mais qu’est ce que l’Evangile ? un livre ? une manière d’être… une manière de vivre... une manière de rejoindre le cœur de message de Jésus. On s’accroche à des symboles, on s’accroche à des livres, on s’accroche à des textes, on s’accroche à des rites. Et on croit que parce qu’on a fait ça, c’est fini. Je suis baptisé ? Fini. Eh bien le centurion de l’Evangile n’était pas du peuple élu. Et dans la première lecture d’aujourd'hui  nous avons aussi la prière de Salomon : quiconque viendra prier ici, quel qu’il soit, exauce-le. La prière du musulman est-elle entendue de Dieu ? mais bien sûr. La prière du païen ? mais bien sûr. Vous croyez que quand on prie Dieu il vous dit : ta carte d’identité. Oui, tu es chrétien tu peux me parler. Non ? Va, dehors.

Nous entrons dans une époque qu’on appelle la mondialisation, « globalisation » que j’appelle « l’œcuménisme intégral », l’ouverture. Le mois prochain, à Héliopolis, j’aurai une conférence là dessus. Le monde sent que les barrières d’autrefois, les clôtures qu’on mettait entre les religions, et les cultures etc. ça ne tient plus. Et les jeunes de la place el tarrihk le 25 janvier 2011 ont constaté tout à coup qu'il fallait dépasser le croissant et la croix, il fallait dépasser le coran et la croix et voilà que les musulmans ont mis leur coran dans la poche, et les chrétiens ont mis leur croix dans  l’autre poche et ils ont brandi le symbole qui les unissait : le drapeau égyptien. En d’autres termes, les religions étaient devenues des prisons, des enclaves, des ghettos. Une religion qui nous crispe sur nous mêmes, qui nous ferme sur nous mêmes, fait fausse route. C’est pas que le christianisme ne soit pas vrai. Il est vrai. Mais le christianisme est une invitation à dépasser le christianisme d’une certaine manière. On dit quelquefois que le Christ n’est pas venu fonder une religion, il est venu ouvrir la religion à l’universel, à l’homme, à l’autre, à la lumière, à la vérité, à une démarche de transcendance, à une foi qui n’est pas propre à quelqu’un ou à quelque confession religieuse, à une foi au-delà de la foi. Une foi qui nous décentre.

Prenez le cas du centurion. 1° cet homme est venu plaider pour qui ? pour un de ses domestiques, lui l’officier supérieur, il vient supplier Jésus de guérir son domestique. Mais de quoi tu te mêles ? laisse-le. Non, déjà cette démarche d’amour était un pas vers la vérité. Et puis, le cri : viens ! sauve-moi ! la foi est un cri, vers quelque chose de plus haut, de plus grand, vers quelqu’un de plus haut, de plus grand. La foi nous libère de ce moi, moi, moi, moi… non, il y a quelqu’un de plus grand. Crie vers lui, prie le, crois en lui et tes limites éclateront et tu verras le miracle : foi chrétienne, foi bouddhiste, foi musulmane : la foi…. Moi ce qui me plait dans le Christ, c’est qu’il n’était pas chrétien. Il n’était pas chrétien.  Il était quoi alors ? il était juif d’abord. Mais il n’était même pas juif. Il est venu justement faire éclater le concept de religion. On a même parlé du christianisme comme la religion de la sortie de la religion. Nous vivons quelque chose aujourd’hui qui est dans l’air. Une espèce de sentiment  d’étouffement chez les gens qui sentent que, ils sont à l’étroit dans leur foi, dans leur religion, dans leurs rites, dans leurs cérémonies, dans leurs dogmes souvent fermés.

Une petite histoire. Un jour, les coptes orthodoxes m’avaient invité dans leur église de […] pendant la semaine de l’unité et l’église était pleine de fidèles, dans l’immense majorité copte orthodoxe. Et alors j’ai dit : pourquoi  est-ce que cette église est copte orthodoxe ? pourquoi ne serait-elle pas pour tout le monde ? les catholiques, les protestants, qui habitent dans le quartier viendraient. Et l’église des jésuites de […] les orthodoxes, les protestants, qui sont dans le quartier viendraient. Ce serait l’église du quartier ! pas orthodoxe, catholique, protestante, une église qui soit un lieu de prière. Eh bien, l’assemblée a applaudi de toutes ses forces ! Et le curé n’était pas content.. Enfin !

maintenant j’ai une autre idée ? pourquoi est-ce que l’église ne serait pas aussi la mosquée ? et pourquoi la mosquée ne serait pas aussi l’église ? pourquoi est-ce qu’on n’aurait pas des lieux de prière qui soient des lieux pour tout le monde ? pour tous ceux qui croient, pour tous ceux qui veulent rencontrer Dieu, pour tous  ceux qui veulent vivre une communion profonde dans la foi, chacun restant ce qu’il est. Il ne s’agit pas de se faire musulman, ni pour le musulman de se faire chrétien, ni pour l’orthodoxe de se faire catholique. Mais quelque chose comme une foi au-delà de la foi telle que conçue autrefois.

Je dis ça parce que l’Evangile d’aujourd'hui nous présente un exemple de quelqu'un qui est ouvert, ouvert à l’autre, le petit, le pauvre, le domestique, ouvert à Dieu dans ce cri qu’il pousse, ouvert à une transcendance, quelle qu’elle soit, quel que soit son nom. Et je vous fais remarquer, puisqu’il s’agit aujourd'hui d’un centurion… On a un autre centurion à la fin de la vie de Jésus qui gardait la croix avec ses soldats et qui fut le premier à reconnaitre en Jésus le Fils de Dieu. Devant ce qui se passait, il a dit : celui-là est en vérité le Fils de Dieu. Le premier a avoir confessé le Christ était un païen. Et donc à l’origine, vous avez 3 mages, païens qui viennent adorer l’enfant dans la crèche, et au terme, vous avez un centurion païen qui lui aussi reconnait le Christ, le Christ, fils de Dieu, et au milieu, aujourd'hui, nous avons cet autre centurion. Et j’ai toute une série d’autres cas, d’autres histoires, d’autres noms, où nous avons des insinuations, des allusions à un message qui dépasse les étroites frontières de ce qu’on appelle aujourd'hui une religion. J’ai un petit fascicule qui regroupe 3 conférences : « vers un au-delà des religions », conférences qui j’ai faites en Europe il y a quelques années. Vers un au-delà des religions… allons-nous vers un au-delà des religions ?  le christianisme est-il  appelé à se dépasser lui-même, pour au-delà de ce qu’il y a d’étroit, d’étriqué, qu’il puisse répondre à sa vocation universelle, universelle ! le Christ est venu pour  rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés. Ça c’est beau, ça c’est la vocation de Jésus. Et toute religion qui n’est pas ouverte à cet universel fait fausse route y compris le christianisme, compris dans ce sens étroit, restrictif.

Aujourd'hui, dans cette époque de mondialisation, de globalisation, d’universalisme, demandons à l’Esprit de souffler, de souffler sur l’Eglise, de souffler sur les religions, de souffler sur notre monde, pour que, chacun étant fidèle à sa vérité, puisse en suivant son étoile se retrouver avec les autres, aux pieds du petit enfant de Bethléem. Amen.

 

 

Partager cet article
Repost0

commentaires