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15 août 2013 4 15 /08 /août /2013 10:27

DIMANCHE 12 JUILLET 2009

MARC 6, 7 - 13

 

Prédication largement inspirée dans le fond et la forme d’une prédication de Bettina Cottin (voir référence note 1)

 

Introduction : « Le récit de l’envoi en mission des Douze en mission est un des textes les plus féconds de tout l’histoire du christianisme. Sa force d’interpellation est toujours aussi fraîche, aussi tonique, et aussi directe. La confiance et la sérénité des disciples qui s’en vont deux par deux, leur apport concret aux malades et aux malheureux, remettent en question, toujours à nouveau, la route de la vie d’Eglise, mais aussi le fonctionnement de notre monde"[1]. Nous verrons le contexte dans l’Evangile de Marc, et les conditions imposées par Jésus, les grandes interpellations du récit d’envoi en mission, puis nous parlerons de nos résistances face à son contenu et enfin, comment cet appel peut nous toucher.

       Suivons donc un moment Jésus et les douze ; leur envoi, les conditions de leur mission, ce qu’ils ont fait et ce qu’il en a suivi…

 

1) le contexte et envoi :

 

 - situons tout d’abord ce passage dans l’Evangile de Marc. Nous avons pu suivre Jésus appelant ses disciples, formant un groupe de « Douze » et parcourant avec eux le pays : annonçant la Bonne nouvelle ((1,39), enseignant avec autorité , guérissant de nombreux malades dont la belle-mère de Pierre,  et déjà suscitant des attitudes contradictoires face à lui, au point qu’il est rejeté de sa propre ville, Nazareth, juste avant notre récit. «Ils étaient profondément choqués à cause de lui » nous dit-on. C’est alors que Jésus, appelant les douze, les envoie deux par deux. Contrairement à ce que nous disent les Evangiles de Matthieu et Luc., Marc ne donne pas de consignes précises sur ce que les douze devront faire, ni à qui ils devront parler (Israël, les Gentils ou les deux ?).

 

- les conditions de la mission : d’autre part, chez Marc, ce qui importe, ce n’est pas tant l’enseignement dispensé qu’un témoignage de pauvreté absolu malgré l’autorisation d’avoir un bâton et de porter des sandales. Marc pensait peut-être aux pèlerins de Pâques du livre de l’Exode (12, 11) : « les reins ceints, les sandales aux pieds, le bâton à la main »….   Les moyens de subsistance, eux, les rendent totalement tributaires des maisons visitées et de la miséricorde divine. Nous notons, au passage, qu’il n’est absolument pas question d’imposer leur point de vue aux personnes rencontrées. Si elles ne les écoutent pas, ils partent en secouant la poussière de leur pied : ce sera là, le seul témoignage donné ». Rite d’un antique usage oriental : on secouait la poussière de ses pieds en quittant un lieu hostile pour marquer la rupture.

 

2) les envoyés : des disciples bien ordinaires, mais pas seuls

 

      - des hommes sans instructions : Et voilà douze hommes, bien différents et pour la majorité ordinaires, des gens du peuple, sans instruction (C’est ainsi que le livre des Actes nous les décrivent). Qui plus est, nous en sourions souvent, ils ne sont  pas toujours dans les rails : souvent largué dans le terre à terre, ou en désaccord les uns avec les autres, sans compter les caractères : les fils de Zébédée ne sont ils pas surnommés par Jésus lui-même (3, 16-17) « Boanergès », fils du tonnerre, nous dirions aujourd'hui, qu’ils devaient démarrer au quart de tour! Et avec pour toute formation ce qu’ils ont entendu de leur du maître et l’expérience vécue des miracles accomplis par Jésus.

      Ils iront « deux par deux ». Etait-ce une coutume juive ? il est vrai que dans la loi de Moïse, deux témoins sont nécessaires pour authentifier une déposition (Deut. 19,15) mais le chiffre deux est aussi le symbole de la communauté : les missionnaires doivent œuvrer, non pas seuls mais en équipe, pratique que les premiers chrétiens ont appliquée à la lettre. Mais surtout, je pense à ces paroles de Jésus : « là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis avec eux ». Ainsi, deux par deux, mais déjà trois. Une force qui n’a pas d’équivalent dans le monde et qui va les propulser sur les chemins vers de nombreuses guérisons et l’annonce de la bonne Nouvelle (selon Matthieu). Voyez le résultat …………… 20 siècles après !

 

      - ces hommes–là, se voient envoyés dans des conditions encore plus difficiles que celles qu’ils avaient acceptées. C’est la raison pour laquelle je n’arrive pas à croire que c’étaient des hommes ordinaires ; fallait-il du jugement et du courage pour suivre le maître aussitôt l’appel lancé ! Ils très certainement mariés, (le mot « célibataire » n’existe pas dans leur langue, pas plus que dans leur monde, à cette époque) avec femme, enfants et peut être parents  à  charge ; un métier durement appris depuis l’enfance, des engagements à respecter, des habitudes acquises, sociales et religieuses ; une vie difficile dans un pays occupé par les romains et menée à la dure, une vie exsangue à cause des impôts trop lourds, et aussi l’esprit plein d’histoires terribles de superstitions qui traversent toutes les générations. Et pourtant …

Les voilà partis sur les routes aux côtés de cet homme étonnant, prophète, guérisseur, enseignant … Rien n’a pu les retenir dans leur vie d’avant. Pierre dira un jour « tu as des paroles de vie éternelle ». Et maintenant, ils doivent encore en faire plus, bien plus : pas de pain, ni de sac, ni de pièces de monnaie à la ceinture ; nous l’avons dit, un bâton, des chaussures, et même pas une tunique de rechange !

             

3) la mission : pour nous ?

             

Ce discours d’envoi peut nous paraître très archaïque, les pratiques très « rustiques » et bien loin de notre monde où l’Eglise, est organisée et structurée, avec sa multiplicité d’Institutions et des moyens de communication insoupçonnables au temps de Jésus. Le cadre de l’envoi des Douze et les conditions de leur mission sont ils compatibles avec la société dans laquelle nous vivons?

      « Les guérisons miraculeuses et à plus forte raison les exorcismes suscitent souvent notre méfiance. Ne s’agit-il pas là d’une représentation primitive du monde que nos méthodes modernes ont largement dépassée ? Le dépouillement de la condition des envoyés suscite notre scepticisme. Cela peut fonctionner un certain temps avec peu de personnes ; mais si on veut durer dans l’histoire, il faudrait peut-être revenir à un plus de normalité. Enfin, il y a de nos jours tellement de mouvements fondamentalistes qui envoient leurs adeptes missionner deux par deux, que cette formule suscite aussi notre réserve. Alors regardons de plus près le texte biblique.

L’envoi des Douze est limité dans le temps et dans l’espace. Les six équipes de deux ne seront jamais très loin de Jésus. Ils ne fonderont pas de nouvelles communautés. Ils œuvreront en toute simplicité comme Jésus le fait lui-même : des guérisons, la mise en échec des démons, la proclamation de la conversion qui comprend aussi l’annonce de l’approche du Règne de Dieu. Ils ne gagnent pas non plus leur vie avec cette activité. Pas d’abus possible puisqu’ils sont totalement dépendants de l’hospitalité qu’on voudra bien leur accorder et dans un seul foyer par village. Quant à l’échec envisagé, il n’a rien de dramatique : pas de condamnation, ni de menaces, juste la poussière que l’on secoue de ses pieds.

Il est intéressant de noter que, dans l’évangile de Marc, à partir du moment où la possibilité de l’échec est pensée et mise en mots, Jésus va lui-même faire l’a lui-même faire l’expérience de plus de difficultés, plus de déceptions et de résistances par rapport à son ministère. Ces difficultés s’accentueront jusqu’à la confession de foi de Pierre et la première annonce de la Passion. Pour comprendre et annoncer le Règne de Dieu, la prédication et les miracles ne suffiront plus. Il faudra aussi la croix, et la résurrection de Jésus »[2].

 

4) la mission : comment ?

 

      Alors, quel appel pour nous aujourd'hui dans l’envoi en mission des Douze ?

      Il me semble en premier lieu, qu’il nous encourage à annoncer la bonne nouvelle par des paroles et par des actes qui fassent vraiment du bien à ceux qui les reçoivent, et en particulier ceux qui sont en souffrance. Ce qui importe ce n’est pas tant le miracle que l’efficacité de la Parole, que des personnes puissent à nouveau se mettre debout, se réapproprier leur vie, leur histoire.

Quant aux démons, ce sont dans l’Evangile de Marc des forces qui détournent les personnes de l’accès à Dieu, et les aliènent dans leur vie sociale, mentale, spirituelle. Même en gardant une vision rationnelle du monde, ne reste-t-il pas suffisamment de démons à combattre ? Tous les systèmes, toutes les idéologies qui veulent nous convaincre du bien fondé du fatalisme, de la guerre, sont entre autre, nos démons des temps modernes.

Le dépouillement de la condition des disciples est vécu par certains. Pour d’autres, il sera avant tout vécu comme une disponibilité très ouverte vis-à-vis de l’autre, différent de soi. La simplicité et la solidarité permettent de rester en état de veille et disponibles.

Nous ne vivons pas pour nous-mêmes mais pour annoncer Jésus-Christ. Un échec peut être lu en lien avec Jésus-Christ même dans nos insuffisances. Notre monde autonome est libre d’accepter ou de refuser le message du royaume. Nous ne sommes pas maîtres de la décision des autres. Et aucun de nous ne connait la réponse de Dieu à cette réaction.

Laissons nous sans crainte appeler par la confiance, la simplicité et l’engagement humain des disciples de Jésus.

 

Conclusion : concluons avec quelques extraits  du « petit guide pratique pour ne pas oublier l’évangélisation dans la définition de nos projets d’Eglise » diffusé par l’Eglise Réformée.

      - la résolution 13 du Synode régional de Florac en 2007 déclare : « l’Evangile de Jésus-Christ est une bonne nouvelle qui nous invite à changer notre regard, pour y discerner les traces d’une présence qui veut ouvrir nos tombeaux et faire sauter tous les verrous de la peur. Cela seul nous fonde et nous constitue. (…) les gigantesques bouleversements que nous vivons en début du 21ème siècle, la sortie de la période de chrétienté ne doivent pas être ressentis comme perte de l’essentiel, mais tout au contraire, comme une chance de revenir à l’essentiel : être les témoins d’une parole qui relève, qui pardonne et qui libère. Nous affirmons notre conviction que l’Eglise se vit d’abord dans un recevoir, qui nous envoie comme témoins dans et pour le monde. »

l’Eglise ne sera ouverte aux hommes qu’en se portant sans cesse à leur rencontre.[3]

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